sement découvert au moment où, armé d’un poignard, il abordait le roi dans une église.
Mais il nous faut nous arrêter : la funèbre liste des crimes commis par cette femme, liste horrible, monotone dans son sanglant développement, demanderait plus d’espace que nous ne pouvons lui en consacrer. Cette monstrueuse nomenclature soulève le dégoût et l’indignation.
Cependant, nous devons suivre encore cette odieuse femme sur un autre théâtre, où nous la retrouverons animée du même esprit diaboliquement perfide.
La guerre venait d’éclater entre Landéric, maire du palais de Clotaire II, et le roi d’Austrasie Childebert. Frédégonde accompagna ses soldats, ayant avec elle le roi son fils, qui n’avait pas encore dix ans. Les deux armées s’étant rencontrées à Droizy, entre Soissons et Château-Thierry, ce fut elle, dit-on, qui conseilla le stratagème de guerre dont usa Landéric. Il fit franchir de nuit, à son armée, la dernière marche qui la séparait de l’ennemi, de manière à le surprendre au point du jour. Pour mieux couvrir le mouvement, chaque soldat avait à la main un grand rameau d’arbre qu’il tenait élevé de manière à cacher tout ce qui était derrière. Enfin, on avait attaché des sonnettes au cou des chevaux, comme il était d’usage lorsqu’on abandonnait ces animaux à la libre pâture dans les bois. Le stratagème réussit. L’armée de Childebert fut surprise et mise dans une déroute complète (593). (Buchez, Formation de la nationalité française.) Ce prince survécut peu de temps à cette bataille. Frédégonde profita des troubles dans lesquels cette mort plongeait l’Austrasie, et la guerre se ranima entre elle et Brunehaut. On se rencontra à Latofao, et la victoire lui resta de nouveau.
Quelque temps après (597), Frédégonde mourut enfin ; elle mourut au milieu de son triomphe et fière de voir son fils rétabli dans ses droits. Toute la vie de cette femme, en effet, avait été consacrée aux intérêts de cet enfant ; c’est pour lui qu’elle avait commis ses plus grands crimes. (Un seul historien, Fortunatus, n’a pas eu le courage de la flétrir.) Il ne pénétra dans son Ame, au moment de mourir, qu’un regret, ce fut de n’avoir pu réussir dans toutes ses homicides tentatives. Un jour, cependant, une épidémie qui ravageait le royaume lui ayant enlevé tous ses enfants, à l’exception de Clotaire, la terrible reine crut à un châtiment céleste, et dit à son époux : « Voilà que nous perdons nos enfants ; ce sont les larmes des pauvres et les gémissements des veuves et des orphelins qui les tuent. Croyez-moi, brûlons tous les édits injustes que nous avons rendus pour lever les taxes. » Les rôles d’impositions que Chilpéric avait fait établir, et qui accablaient ses sujets, furent alors brûlés. C’est la seule bonne action qui apparaisse dans toute sa vie.
Frédégonde fut enterrée auprès de son époux, dans la basilique de Saint-Vincent ou Saint-Germain-des-Prés, où l’on voyait, avant le xviiie siècle, la pierre qui recouvrait son tombeau. Cette pierre, un des plus anciens monuments funèbres de nos rois, se trouve aujourd’hui au musée de Cluny. C’est une mosaïque représentant Frédégonde en habits royaux, le visage couvert d’un voile, à cause de son veuvage.
Frédégonde et Brunehaut, tragédie de Lemercier,
représentée au Théâtre Français
en 1821. L’auteur a bien senti que des trois
personnages principaux que lui présentait
l’histoire, aucun ne pouvait être sympathique.
Aussi a-t-il cherché à faire reposer l’intérêt
de son drame sur le jeune Mérovée, ce fils
chéri de Chilpéric, victime dès longtemps
dévouée aux fureurs de sa marâtre. En effet,
Mérovée, passionnément amoureux de Brunehaut,
qu’il a épousée contre la volonté de
son père ; Mérovée, qui croit être aimé de cette
perfide reine d’Austrasie, et qui se voit abandonné
par elle au moment où elle est certaine
de pouvoir occuper le trône sans lui, Mérovée,
qui exprime avec une profonde énergie
les tourments d’un amour cruellement abusé,
et qui, délaissé par sa femme, tombe bientôt
sous les coups de Frédégonde, est un personnage
dramatique et intéressant. Il rappelle
celui de Séleucus dans Rodogune. L’auteur
a trouvé, dans un sujet non sans analogie
avec celui qu’a traité le grand Corneille, des
traits remarquables. Mais la conception générale
de la pièce est défectueuse ; l’exposition
est lente et obscure ; l’action s’engage
péniblement. Quelques anachronismes, des
expressions impropres, des inversions forcées,
défauts moins sensibles dans cette pièce
que dans les autres tragédies de Lemercier,
sont plus que rachetés par des qualités bien
à lui : force dans les idées, élévation et noblesse
dans la pensée, traits passionnés, mouvements
tragiques, élans imprévus, vers d’une
énergique simplicité. Il est à supposer que
Lemercier aurait traité différemment son sujet,
s’il avait bien connu les mœurs et le caractère
de ces Francs que les écrits historiques
de Chateaubriand et d’Augustin Thierry
nous ont révélés, au grand scandale des gens
qui s’accommodaient si bien des préjuges et
des conventions de l’ancienne histoire.
FREDENSBORG, village du Danemark,
dans l’île de Seeland, à 4 kilom. N. de Frederiksborg,
près du petit lac Esrom ; 600 hab.
Château royal, construit par Frédéric IV, et
renfermant une belle galerie de tableaux. Un
traité de paix entre le Danemark et la Suède
y fut signé en 1720.
FREDER (Henri), écrivain polonais, né à
Dantzig en 1604, mort en 1654. Il fut membre
du sénat de sa ville natale, et eut de son
temps une réputation d’érudition. On a de lui :
Oratio de crocodilo, gua triumphus Christi exponitur (1621) ; Orationes quatuor in Academia Tubigensi (1627) ; Gymnasmata academica (Leipzig, 1628) ; Quaestiones monetales (Dantzig, 1830). Ce dernier ouvrage renferme
de précieux renseignements sur l’histoire monétaire de la Pologne, et a été utilisé par Lelewel.
FRÉDÉRIC s. m. (fré-dé-rik). Métrol. Monnaie d’or de Prusse, frappée à l’image du roi
Frédéric, et, par ext., Monnaie d’or prussienne
d’un type quelconque, valant 20 fr. 80. || Double frédéric, Monnaie d’or de Prusse,
valant deux frédérics, ou 41 fr. 60.
— Encycl. Le frédéric est une monnaie d’or de Prusse, qui doit son nom aux rois de cette nation, qui portèrent tous le nom de Frédéric jusqu’en 1861. Elle est au titre de 906 millièmes, du poids de 6 gr. 65 et circule en Prusse pour 5 thalers (18 fr. 75). Cependant sa valeur est plus considérable : elle est de 20 fr. 80 environ. Cette dépréciation en Prusse provient, non-seulement de la proportion monétaire, qui n’est que de 1 à 14, au lieu de 1 à 15 1/2 comme en France, mais encore de ce que, dans ce pays, comme en Allemagne et en Hollande, le taux numéraire des monnaies d’or n’est pas fixe ; ces monnaies suivent le cours des marchés sur l’or et jouissent communément d’un agio qui varie de 10 à 18 pour 100 en sus de leur valeur nominale. La valeur courante du frédéric de Prusse atteint quelquefois jusqu’à 21 fr. 10. Ces pièces ont pour empreinte l’effigie du roi, avec la désignation de ses titres pour légende ; au revers, l’aigle royale posée sur un trophée au-dessous duquel est le millésime, sans légende, Depuis le traité du 24 janvier 1857, ces pièces ne font plus partie du système monétaire de la Prusse, dont les monnaies d’or sont exclusivement des couronnes et demi-couronnes ; mais elles n’ont pas cessé d’y circuler pour 5 thalers.
En Danemark, depuis 1818, époque del’avénement de Frédéric VII, les pièces d’or connues sous le nom de Christian prirent celui de frédéric ; elles sont aux mêmes types, moins l’effigie du roi, et ont la même valeur que les monnaies du règne précédent. V. Christian.
FRÉDÉRIC Ier, dit Barberousse, empereur d’Allemagne, né en 1121, peut-être à Waiblingen (d’où serait venu à ses partisans le nom de gibelins.) Il était fils de Frédéric le Borgne duc de Souabe et petit-fils de l’empereur Henri IV.
En 1147, il succéda à son père dans la possession
de son duché, et il fut élevé à la dignité
impériale en 1152, à la mort de son oncle
Conrad III. Après avoir pacifié l’empire et
châtié les burgraves des rives du Rhin, il reprit
les projets de ses prédécesseurs sur l’Italie,
et passa six fois les Alpes pour soumettre
Rome et les villes lombardes. Ces expéditions
et les guerres qui en furent la conséquence
occupent la plus grande partie de
son règne. Elles se terminèrent par la paix de
Constance (1183), sorte de conciliation entre
les privilèges impériaux et les libertés italiennes,
et dont les conditions furent longtemps
regardées en Italie comme la base du
droit public. Enfin, en 1189, à un âge où l’on
aurait pu le croire fatigué de guerres, il prit
la croix et partit pour la terre, sainte à la
tête de 100,000 hommes. Il traversa l’Hellespont,
remporta une grande victoire devant
Iconium, et, peu de temps après, se noya par
accident dans la rivière de Saleph (l’ancien
Cydnus), en 1190. Frédéric Barberousse fut
un des plus grands empereurs de l’Allemagne,
et son souvenir est resté populaire dans les
légendes de ce pays.
FRÉDÉRIC II, empereur d’Allemagne, roi de Sicile et de Jérusalem, fils de l’empereur Henri VI, né à Jesi (Marche d’Ancône) en
1194, mort en 1250. Héritier de la Sicile par
sa mère Constance, élu roi des Romains du
vivant de son père, resté orphelin à l’âge de
quatre ans, sous la tutelle du pape Innocent
III, il se vit disputer l’empire d’Allemagne
par son oncle Philippe de Souabe et par
Othon de Brunswick, qui resta seul maître
en 1209. Ce ne fut qu’en 1212 qu’il se mit en
mesure de faire valoir ses prétentions. Il partit
de Palerme, gagna la Suisse et se présenta
devant Constance avec 60 cavaliers.
Sa troupe augmenta successivement ; des
princes et des seigneurs entrèrent dans son
parti. L’Allemagne, lasse des luttes de faction,
l’accueillit comme une espérance de
paix, et il triompha enfin de son rival, déjà
vaincu à Bouvines par Philippe-Auguste.
Couronné à Aix-la-Chapelle (1215) comme
roi d’Allemagne, il obtint du pape Honorius III
l’investiture de la dignité impériale à Rome
(1220), après avoir renouvelé solennellement
la promesse d’une croisade, ainsi que la confirmation
d’une foule de privilèges pour l’Église. Allemand de race, mais italien d’éducation,
esprit cultivé, pupille d’un pape, élève
de deux cardinaux, ce prince vraiment supérieur
à son époque se distingua par un caractère
particulier d’habileté, de duplicité
même, et par la situation singulière qu’il prit
vis-à-vis du saint-siége, dont il était le client,
mais dont il se garda bien d’être le serviteur.
En apparence, il se montrait plein de déférence
et de respect pour le souverain pontife,
renouvelait à chaque instant et sous les
serments les plus solennels des promesses
qu’il ne tenait jamais, et se montrait enfin le
fils le plus soumis et le plus humble de l’Église, mais en même temps le plus désobéissant. Fatigué d’une comédie qui durait depuis près de dix ans, Grégoire IX. en succédant
à Honorius III (1227), fulmina enfin une
excommunication contre lui. Frédéric cessa
dès lors de dissimuler. Il marcha sur Rome
à la tête de mercenaires arabes, en même
temps qu’il faisait soulever le peuple dans la
ville et chasser le pape à Viterbe. Mais sentant
que l’anathème pesait sur lui d’un poids
accablant, il partit enfin pour la terre sainte
(1228), et, par suite de négociations avec le
Soudan d’Égypte, s’empara sans coup férir
de Jérusalem, où il se fit couronner roi. On
prétend qu’il se couronna lui-même, aucun
prêtre n’ayant voulu entrer en relation
avec un excommunié. La Chronique de Matthieu
Paris donne même un exemple d’un
scepticisme bien extraordinaire pour l’époque,
et surtout chez un prince nourri à la cour
pontificale. Suivant ce récit, Frédéric, au milieu de conférences philosophiques avec l’émir
de Jérusalem, se serait laissé aller à des
railleries sur la stérilité du sol de la Palestine, en disant que si Jéhovah avait connu le royaume de Naples, il n’aurait pas été choisir
pour l’héritage de son peuple les rochers
arides de la Judée. Quoi qu’il en soit, Frédéric
se réconcilia avec Grégoire IX en 1230,
passa en Allemagne en 1235 pour comprimer
la révolte de son fils Henri, marcha, en 1237,
contre la ligue lombarde, soumit presque
toutes les villes de la Lombardie, et fut excommunié de nouveau pour n’avoir pas respecté les domaines du saint-siége. Cette fois,
Grégoire IX prêcha une croisade contre lui
et prononça sa déposition ; mais les princes
chrétiens ne répondirent pas à son appel ;
saint Louis lui-même, en refusant la couronne
impériale qu’on lui offrait pour son frère, accusa le souverain pontife de violence. Grégoire
en mourut d’apoplexie. Innocent IV reprit
cette guerre et la poursuivit toute sa vie
avec une violence et une opiniâtreté qui contrastaient avec la modération de Frédéric ; celui-ci ne cessait de faire des propositions d’accommodement. Ce fut en vain que le pape,
réfugié à Lyon, offrit successivement la couronne
impériale à divers princes ; il ne recueillit
que d’humiliants refus ou il ne suscita que des compétiteurs ridicules et impuissants. Frédéric
II mourut au château de Fiorentino, dans la Pouille. On soupçonna qu’il avait été
empoisonné par son fils naturel Mainfroy.
C’était un prince éclairé, instruit, qui encouragea les sciences et les lettres, les arts et l’industrie dans ses vastes États, et composa
lui-même plusieurs ouvrages, ainsi que des
poésies. On lui attribue, entre autres, un traité
de chasse : De arte venandi cum avibus, et
une série de Questions philosophiques adressées à des docteurs chrétiens et musulmans.
Les historiens lui reprochent des mœurs licencieuses et une impiété qui était un scandale
à cette époque.
FRÉDÉRIC III, dit le Pacifique, empereur d’Allemagne et duc d’Autriche (en cette qualité
il porte le nom de Frédéric V), né à Inspruck en 1415, mort en 1493. Il fut appelé
au trône d’Allemagne en 1440. C’était un
prince indolent et sans énergie, adonné à
l’astrologie, à l’alchimie et à la botanique,
d’une intelligence remarquable, mais tout à
fait dépourvu des fortes qualités politiques
que les circonstances réclamaient alors dans
un prince. Au milieu des guerres féodales qui
déchiraient l’Allemagne, de la conquête de
Constantinople par les Turcs, des guerres religieuses
en Bohème et de l’immense mouvement
produit par les grandes découvertes
maritimes, par l’invention de l’imprimerie,
par les guerres civiles d’Italie, par la ruine
successive de la féodalité, il ne sortit que rarement de son apathie naturelle et continuait
de cultiver ses plantes, pendant que les Turcs
entamaient son héritage. Il fut le dernier empereur qui alla se faire couronner à Rome. Il
eut quelques guerres sans résultat avec la
Suisse, avec la Hongrie, avec la Bohême, vit
avorter tous ses plans et mourut d’indigestion,
laissant à son fils Maximilien le soin de
réaliser la devise qu’il avait choisie pour sa
maison : A. e. i. o. u. (Austriae est imperare orbi universo, Il appartient à l’Autriche de
commander à l’univers), devise bien ambitieuse
pour un tel prince.
FRÉDÉRIC Ier, le Catholique, duc d’Autriche,
né en 1174, mort en 1198, succéda à
son père Léopold le Vertueux. Il restitua, sur
la demande du pape, les sommes et les otages
reçus pour la rançon de Richard Cœur de
Lion, se croisa en 1197, se rendit en Palestine,
où l’expédition n’eut aucun succès, par
suite de la discorde qui régna entre les croisés,
et mourut au moment où il allait repartit
pour l’Europe.
FRÉDÉRIC III, dit le Beau, archiduc d’Autriche,
né en 1286, mort en 1330, était fils de
l’empereur Albert Ier. Il ne put obtenir de
succéder à son frère Rodolphe sur le trône
de Bohème, et ne fut pas plus heureux lorsqu’il
aspira à l’empire. En 1314, six électeurs
donnèrent leurs voix à Louis de Bavière, qui
fut couronné à Aix-la-Chapelle le 26 novembre
de la même année. Quatre électeurs se
prononcèrent en faveur de Frédéric, qui, de
son côté, se fit couronner par l’archevêque
de Cologne. L’Italie et l’Allemagne se partagèrent entre les deux compétiteurs, dont les
armées se rencontrèrent près de Mülhdorf en
1322. Fait prisonnier, Frédéric fut enfermé
dans la forteresse de Trausnitz, où il resta
trois ans. Louis de Bavière Lui rendit la liberté, à condition qu’il renoncerait à toute
prétention à la couronne impériale, qu’il ferait
consentir ses frères à rendre toutes les
terres relevant de l’empire, et que, dans le
cas où ceux-ci refuseraient, il se reconstituerait prisonnier. Le frère de Frédéric, Léopold, protesta contre ce traité et déclara qu’il défendrait ses droits par les armes. Fidèle à sa promesse, Frédéric alla offrir à l’empereur
de reprendre ses chaînes ; mais celui-ci ne
voulut pas montrer moins de grandeur d’âme
et lui laissa la liberté. Il l’embrassa, et, en
signe d’amitié, dit-on, il le fit coucher avec
lui dans le même lit. Schiller et Uhland ont
célébré dans leurs vers ce trait de la loyauté
allemande.
FRÉDÉRIC V, l’Ancien, duc d’Autriche,
mort à Inspruck en 1436, était fils du duc
Léopold l’Ancien. Il s’empara, en 1410, des
domaines importants que possédait dans le
Tyrol Henri de Rattenberg, qui avait suscité
contre lui le duc de Bavière. L’année suivante,
il fit avec la ville de Bâle une guerre
que termina un traité de paix pour cinquante
ans, puis un autre traité mit fin aux hostilités
qui avaient recommencé entre l’Autriche et
la Bavière en 1412. Après l’avènement de Sigismond
à l’empire, ce prince convoqua à
Constance un concile pour mettre fin au
schisme qui désolait l’Église (1414). Le pape
Jean XXIII, ayant tout à craindre de Sigismond,
s’assura, avant de s’y rendre, un appui
dans Frédéric d’Autriche. Il le nomma
généralissime de ses troupes et lui promit une
pension de 6,000 florins d or. Lorsque le concile
fut ouvert, Sigismond fit garder par ses
troupes la salle d’assemblée. Le pape, effrayé,
s’enfuit de Constance, déguisé en postillon,
pendant que le jour même, pour faciliter ce
départ, Frédéric donnait un tournoi. À peine
la retraite du pape dans un château appartenant
au duc d’Autriche fut-elle connue, que
l’empereur Sigismond dénonça ce dernier au
concile, le fit excommunier, le mit lui-même
au ban de l’empire et délia ses sujets de leur
serment de fidélité. Trop faible pour résister,
voyant ses États se détacher de lui, Frédéric
consentit à implorer son pardon à genoux et à
livrer le pape. Cette faiblesse déplorable ne
parvint point à désarmer Sigismond, qui le fit
détenir dans un château fort sur le Rhin, le
dépouilla d’une partie de ses domaines et le
pressura à tel point qu’il reçut alors le surnom
de Frédéric à la bourse vide (Friedel mit der leeren tasche).
FRÉDÉRIC-GUILLAUME, dit le Grand Électeur de Brandebourg. V. Brandebourg.
FRÉDÉRIC Ier, roi de Prusse, fils du grand électeur Frédéric-Guillaume, né à Koenigsberg en 1657, mort en 1713. À la mort de son père (1688), il annula le testament qui partageait
l’électorat et les autres possessions entre
lui et ses frères, s’empara de l’autorité en
même temps que de tous les États héréditaires
et aspira dès lors au titre de roi. Il secourut
Guillaume d’Orange lors de l’expédition
qui lui donna le trône d’Angleterre, entra
en 1691 dans la coalition contre la France,
fournit des hommes et de l’argent à l’empereur
dans sa guerre contre les Turcs, et obtint,
en échange, d’ériger le duché de Prusse
en royaume, à des conditions qui donnaient
à l’Autriche une sorte de suzeraineté. Frédéric
s’engageait, en effet, à voter comme l’empereur
dans toutes les affaires concernant
l’empire, à ne donner sa voix qu’à un prince
autrichien, lors des élections à l’empire, et à
entretenir à ses frais un corps de 10,000 hommes
tant que durerait la guerre de la succession
d’Espagne. Il se fit couronner à Kœnigsberg,
avec un faste inouï, en 1701, après avoir
institué l’ordre de l’Aigle noir, et se vit reconnu
par tous les rois de l’Europe, à l’exception
du pape, des rois de France et de
Pologne. Frédéric s’abstint de prendre part
aux sanglants démêlés de la Suède et de la Russie ; il s’occupa de donner au royaume
qu’il venait de fonder des institutions qui
pussent le placer au rang des plus grandes
puissances ; il augmenta l’étendue de ses États
par l’annexion des comtés de Meurs et de
Lingen, de la Gueldre, des principautés de
Neufchâtel et de Valengin, du comté de Tectlenbourg, etc. Ce prince protégea les sciences, les arts et les lettres. Ce fut sous son règne que l’illustre Leibnitz alla s’établir à Berlin, où il put enseigner librement et où il
devint premier président de l’Académie des
sciences. Frédéric embellit et agrandit Berlin,
fonda Charlottenbourg et institua l’Académie
de peinture (1696) et l’Académie des
sciences de Berlin (1707). Frédéric le Grand,
son petit-fils, lui reprochait son faste, sa prodigalité et les conditions humiliantes auxquelles il se soumit pour obtenir le titre de
roi.
FRÉDÉRIC-GUILLAUME Ier, roi de Prusse, fils de Frédéric Ier, né en 1688, mort en 1740.
Il reçut à la cour de son grand-père, l’électeur
de Hanovre, une éducation plus bourgeoise
que princière. De retour à Berlin, son
père lui donna pour gouverneur le comte de