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il a, tout en gardant l’anonyme, coopéré à la fondation du journal e Républicain (1870-71).

GANG s. m. (gangh). Nom donné, en ’ Amérique, à tout lieu sauvage, peu accessible, ordinairement marécageux et boisé, où se réfugient les nègres marrons : Tu par les de sécurité et lu sais bien que, si formidables que soient les gangs d’un nègre marron, nos c/iasseurs finissent toujours par les découvrir, et qu’un coup de fusil à tirer ne coûte rien à ceux-ci pour arrêter un esclave dans sa fuite, pourvu qu’ils gagnent la prime qu’on leur paye. (Xavier Ëyma.)

GANOA s. m. (gan-ga). Prêtre des idoles au Congo.

— Ornith. Genre d’oiseaux gallinacés, voisin des tétras : Les gangas ne perchent ja~ mais. (Fr. Gérard.)

— Encycl. Les gangas sont des oiseaux gallinacés, assez voisins des tétras, auxquels ils ressemblent beaucoup par leur forme générale. Ils ont pour caractères principaux :m bec convexe, robuste, plus court que la tête, courbé vers la pointe ; les yeux bordés d’un repli nu et lisse ; les narines basales, à demi fermées par une membrane et recouvertes

’ en partie par les plumes du front ; les ailes larges et pointues, à rémiges graduées, la première dépassant toutes les autres ; la queue pointue, munie de filets dans quelques espèces ; les tarses emplumés en grande partie ; trois doigts antérieurs réunis a leur base ; un pouce rudimentaire. Ces oiseaux, dont la taille varie de celle de la perdrix à celle de la caille, ont en général une couleur isabelle, avec des bandes plus ou moins "marquées et en nombre variable sur la poitrine. Les femelles diffèrent des mâles par leur plumage marqueté de noir. Les gangas habitent surtout l’Asie et l’Afrique ; quelques espèces ■ sont de passage dans l’Europe méridionale ; l’une d’elles y est même sédentaire. Quoiqu’ils aient le port assez lourd, leur vol est élevé et rappelle celui des pigeons. Ils vivent dans les plaines sablonneuses et incultes, près des sources des torrents, au milieu des buissons et des bruyères. Ces oiseaux sont essentiellement voyageurs. Les uns vivent en bandes nombreuses, les autres simplement en famille. Ils ne perchent jamais. Quand un danger les menace, ils se blottissent à terre et ne s’envolent que quand ils sont vivement harcelés ; ils poussent alors un cri aigu. Du reste, ils sont assez difficiles à approcher, par.ce qu’ils se tiennent d’habitude dans les lieux découverts. Ils se nourrissent de graines et d’insectes. À l’inverse des autres gallinacés, les gangas sont monogames ; aussi se séparent-ils par couples à l’époque des amours. La femelle pond à terre, sous un buisson et sur quelques brins de paille, trois à cinq œufs de la grosseur de ceux de la perdrix ; elle les couve alternativement avec le mâle. Les petits se mettent à courir en sortant de l’œuf, et, dès qu’ils sont en état de voler, ils vont rejoindre la bande. On leur fait une chasse assez active, parce que leur chair est très-bonne a manger.

Le ganga cata, appelé aussi gelinotte des Pyrénées, est l’espèce la mieux connue ; il vit dans’ le midi de 1 Europe ; mais il est rare on France, où on ne le trouve guère que dans les Pyrénées et sur les bords de la Méditerranée. C est un très-bel oiseau, au vol très-rapide et assez soutenu ; en hiver, il se mêle aux troupes des pluviers dorés, avec lesquels il joue et vole assez longtemps dans l’air ; mais il ne s’écarte jamais de son quartier habituel, et il y retourne en abandonnant les pluviers, dès qu’il voit ceux-ci aborder au-dessus des marais. Son naturel est farouche et inéiiant. Sa voix est forte et ressemble quelquefois à l’aboiement d’un petit chien.

Le ganga unibande se trouve assez souvent au pourtour du bassin méditerranéen ; on le rencontre depuis la Tartarie jusqu’au Sénégal ; la femelle dépose sesceufs dans un trou creusé dans le sable. Le ganga vélocifère ou namaquois habite les déserts de l’Afrique, dans le voisinage des sources, qu’il indique souvent au voyageur altéré.

GANGA, déesse de la pureté, qui personnifie le Gange dans la cosmogonie indoue. Cette divinité, qui, selon les uns, était née du pied de Vichnou, qui, selon d’autres, était la fille aînée d’Himavan, n’était pas encore apparue au monde lorsqu’un jeune homme, nommé Barigeta ou Baglratha, ayant appris que les membres de sa famille, pulvérisés par Kapila, reviendraient à la vie si l’eau du Gange arrosait leurs cendres, gagna la faveur de Brahma par des pénitences innombrables et obtint de lui que Ganga descendît sur la terre. Toutefois Ganga ne consentit à quitter le ciel qu’à la condition que Siva ou Èswara soutiendrait sa masse d eau. Fléchi par les actes d’effrayante austérité de Barigeta, Siva y consentit. Ganga se précipita alors en onde furieuse espérant renverser Siva ; mais celui-ci, réunissant toutes ses forces, contint l’altière déesse dans les boucles de sa chevelure. « Elle s’efforça vainement, dit Jacobi, de s’échapper do cette prison singulière ; ce ne fut qu au bout de plusieurs siècles que de nouvelles macérations de Barigeta amollirent enfin le cœur.de Siva, dont la chevelure s’ouvrit et laissa passage à Ganga. Elle forma d’abord le lac Vindhou, puis s’épancha en sept grands fleuves, dont te dernier était la déesse elle-même, la di GANG

vine Ganga, rivière purificatrice qui lave de toute souillure. » En coulant à travers le pays de Bengale, elle arrosa les cendres de 60,000 hommes consumés par le feu, et leurs corps furent rappelés à la vie.

La déesse Ganga est dans l’Inde l’objet d’un culte particulier. Elle forme, avec le Djoumara et le Saresanati, une trinité divine adorée sous le nom de ïribeni. On la représente sous la forme d’une femme vêtue de blanc, portant une couronne, assise sur un poisson, ayant dans sa main droite un lotus, et dans sa main gauche un luth. Elle fuit, dit-on, devant la mer, deux fois par jour. Cependant, autrefois, elle épousa Sautanou, incarnation du dieu de la mer, dont elle eut Bhlchma, aïeul des Pàndavas. Par suite d’une imprécation de Vichnou, elle était obligée de tuer ses enfants à leur naissance. Au huitième, son mari l’en empêcha et elle le quitta. Quand elle descendit du ciel, les dieux, sachant quelle était la vertu de ses eaux, réclamèrent auprès de Brahma, qui consentit à ce qu’elle existât à la fois au ciel, ^sur la terre et dans les enfers. Au ciel, on l’appelle Mandàkini ; sur la terre, Ganga ; aux enfers, Bhàgavati. On voit facilement que toutes ces fables sur le Gange sont allégoriques et servent à voiler des phénomènes purement naturels.

GANGA-GRAMMA, mauvais génie, très-redouté des Indous, qui, pour se le rendre favorable, lui ont élevé de nombreuses pagodes, et célèbrent sa fête en très-grande pompe. On le représente avec une tète, quatre bras, et tenant dans la main droite une fourchette à trois pointes.

GANGAMON s. m. (gan-ga-mon — du gr. gaggamon, filet). Anat. anc. Epiploon.

GANGANEI.L1, pape. V. Clément XIV.

GANGARIDES, en latin Gangaridm, ancien peuple de l’Inde en deçà du Gange, sur les deux rives et à l’embouchure de ce fleuve, dans le Bengale actuel, autour de Calcutta.

GANGASIMEKA s. m. (gan-ga-zi-mé-ka). Prêtre du Congo, de la secte des gangas.

GANGACTR1 ou GANGOUTRV, village de l’Indoustan anglais, présidence de Bengale, sur le Baghirati, une des sources du Gange. Il possède un temple où les Indous se rendent en pèlerinage, persuadés que cette visite rachète toutes leurs fautes et leur assure un bonheur éternel dans l’autre monde.

GANGE (Granges), le plus grand fleuve de l’Inde, formé dans le pays appelé Sinnour par la réunion du Bhagirathiganga et de l’A-Sakanandaganga, qui ont leurs sources sur le versant méridional des monts Himalaya, le premier pies de Gangautri, au pied d’un énorme glacier, et l’autre vers Bhadry-Nath. Le Bhagirathiganga est considéré comme le vrai Gange. Après leur jonction, les deux branches prennent le nom de Gange. « Le fleuve, dit le Dictionnaire géographique universel, coule du S.-E. au N.-O., depuis Gangautri, au milieu des montagnes, et au S.-Û., depuis Sauki, vers Hourdvar, où il franchit la chaîne qui sépare en partie le Gorval du ; Delhi, et entra dans cette dernière province, dont il parcourt le centre. Parvenu dans l’Agrah, il se porte au S.-E, conserve cette direction en séparant l’Oude de l’Agrah et de l’Allahabad, traverse ce dernier pays en décrivant un arc, coupe le Bahar de l’O. À l’E., et pénètre enfin dans le Bengale, où il reprend une direction S.-E. C’est dans cette province, près de Souty, à G5 lieues de la mer en ligne droite, et à 100 en tenant compte des sinuosités du fleuve, qu’il se sépare en deux grnndes branches, qui forment un vaste delta, entrecoupé d’une infinité de bras du même fleuve, et dont la partie qui borde la’ mer esfr^gomposée d’un labyrinthe de criques et de rivières nommées les Sonderbonds. La plus orientale et la plus considérable de ces deux branches principales conserve le nom de Gange et se rend dans le golfe du Bengale, près et à l’O. du Brahmapoutre, dont elle n est séparée que par quelques lies très-basses ; la branche occidentale, appelée d’abord Cossimbazar ou Baghirati, reçoit plus bas le nom d’Hougly, et se jette dans la mer un peu au-dessous d’Indjelly. » Le cours total du Gange est d’environ 3,100 kilom. Sa largeur varie de 800 à 4,800 mètres. Il a une vitesse de 5 kilom. à l’heure dans les basses eaux, de 8 à 12 kilom. dans les hautes eaux. Un nombre considérable de rivières portent au Gange le tribut de leurs eaux ; les plus importantes sont : le Cally-Neddy, la Djemnah, laTonsa, la Sone, le Foulgo, la Dommoudah, sur la rive droite ; la Kauiganga, le Goumty, la Gogra, le Gondock, le Bogmotty, le Kosi, le Mahanada, la Tystah, sur la rive gauche. Parmi les cités les plus populeuses qu’il baigne dans son cours majestueux, nous signalerons : Calcutta, Moorshehabad, Dacca, Chinera, Chandernagor, Hoogly, Cutwa, Boorhampour, Cossimbazar, Kishenagur, Jessore, Uajemahal, Monghir, Patna, Ghazipour, Benarès, Allahabad, Canpour, Éuruckabad, etc. On trouve sur ses bords une quantité innombrable de villages et de lieux saints. Il n’est traversé par aucun pont. Les riverains le passent sur des bateaux grossièrement taillés.

Comme le Nil, le Gange est sujet à des inondations annuelles périodiques. Il commence à s’élever vers la fin d’avril. La plus grande hauteur de l’inondation a lieu vers la

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fin de juillet. Les parties les, plus basses du Bengale, qui avoisinent le fleuve, sont couvertes par les eaux. L’inondation commence à décroître vers le milieu du mois d’août. On a calculé que, du mois de juin au mois de septembre, le Gange roule, par seconde, 2,027,347,200 mètres cubes d’enu. -Un des faits les plus remarquables de l’inondation du Gange est le changement qu’elle produit tous les ans dans le lit du fleuve. Le Gange est la grande voie militaire qui a permis aux Anglais de conquérir les plus riches provinces de l’Indoustan. Non-seulement le fleuve principal, mais tous ses tributaires sont navigables pour les grands comme pour les petits navires. Le nombre des bateliers employés sur le Gange est évalué k 300,000.

Le Gange est un fleuve sacré pour les habitants du pays qu’il arrose. « Celui qui a le bonheur de mourir sur ses rives, ou seulement de boire de son eau avant de mourir, n’a pas besoin, dit un historien, pour revenir sur terre, de subir les longues épreuves de la transmigration des âmes. Aussi apporte-t-on de toutes parts au fleuve des malades pour les immerger dans ses eaux ou pour y abandonner leurs cadavres quand ils sont morts. Ceux qui habitent loin du fleuve sacré conservent toujours, dans de petites fioles, de son eau, objet d’un important commerce, afin de pouvoir en boire à l’heure de leur mort. S’ils sont riches, ils ont soin que leur corps soit brûlé, qu’on recueille précieusement leurs cendres et qu’on les jette dans le Gange. •

GANGE (golfe du), en latin Gangeticus sinus, nom ancien du vaste golfe compris entre les deux presqu’îles de l’Inde, et nommé de nos jours golfe du Bengale.

GANGE (canal du), creusé dans ces dernières années par les Anglais. Il a 24 mètres de largeur, 3 mètres de profondeur moyenne et 800 milles de longueur. Il part du Gange à Hurdwar et vient le rejoindre à Canpour. Ce canal est de la plus haute importance pour le transport à l’intérieur des blés et des grains.

GANGES, nom latin du Gange.

GANGES, héros, fils du fleuve Gange, aussi remarquable par sa taille colossale que par sa beauté et son courage. Il chassa les Scythes de l’Inde, y fonda soixante villes, et fit dessécher un grand nombre de marais qui répandaient la peste dans le pays.

GANGES, ville de France (Hérault), ch.-I. de cant., arrond. et k 46 kiioin. de Montpellier, sur une presqu’île formée par le confluent du torrent de Sumène et de l’Hérault, qui y roule des eaux d’une admirable limpidité, sur un lit de rochers et de cailloux ; pop. aggl., 4,118 hab. — pop. tôt., 4, m hab. Ganges est un des centres d’industrie les plus importants du département de l’Hérault. On y trouve 16 ateliers de filature ou de dévidage do coton, et 56 moulins pour dévider la soie. La plus grands partie de ces industries emploié comme moteur un beau canal dérivé de la rivière du Vis. « Le torrent de la Sumène et l’Hérault, dit M. Ad. Joanne (Auvergne et Dauphïné), ne pénètre dans.le bassin de Ganges qu’après avoir péniblement traversé des défilés tortueux, formés par l’escarpement de blanches montagnes calcaires ; réunis, ils n’en sortent qu’en coupant une nouvelle chaîne de rochers ; aussi Ganges est-elle dominée ; par des sommets calcaires dont le plus rapproché porte les ruines d’un château. Les plus escarpés, sinon les plus hauts, se dressent au-dessus de la rive droite de l’Hérault, qu’ils séparent du Vis, en cachant à la ville la belle pyramide du pic d’Anjeau (865 mètres), les rochers de la Tude (896 mètres), et la-chaîne de la Séranne (913 mètres). » Ganges possède de jolies promenades, une belle place et des fontaines abondantes. Ses environs sont fort pittoresques, surtout sur les bords de l’Hérault dont la vallée, de plus en plus sauvage, s’encadré do hauts escarpements rocheux. Le canal du Vis l’ait mouvoir une roue immense qui élève une partie de ses eaux au niveau de la ville.

Près de Ganges se voit une magnifique grotte naturelle, qui ne le cède point aux plus célèbres grottes connues, telles que la grotte de Fingal, en Irlande, ou celle d’Antiparos, en Grèce. Elle s’appelle en languedocien Baoùma dé las Doumaïzelas, c’est-à-dire Grotte des Demoiselles ou des Fées. Une ancienne tradition en a fait leur demeure.

Ne pénètre pas aisément qui veut dans la’ Baoùma dé las Doumaïzelas, L’accès en est très-difficile. Un des rares touristes qui l’ont explorée à peu près en entier en a fait une longue description que nous reproduisons en partie. • L’ouverture de la grotte, au niveau du sol, présente une excavation d’environ 7 mètres de diamètre, sur une profondeur de 70 mètres. Elle est couverte d’arbres et de vignes sauvages. Parvenus à l’entrée de la première salle, dont le terrain est fort incliné, humide et couvert de capillaires, nous apercevons des piliers présentant l’aspect de palmiers alignés ; ils se dessinent en forme de galerie et doivent avoir 10 mètres d’élévation. Une deuxième salle nous étonne par son immensité. À gauche en entrant, on aperçoit un rideau d’une hauteur que l’œil ne peut mesurer ; on le dirait plissépur le plus habile artiste. Là, s’élancent de belles colonnes, les

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unes en obélisques, les autres tronquées. Sur nos têtes ondulent des nuages blancs comme de l’albâtre. La clarté de nos flambeaux, que reflètent les nombreuses cristallisations dont ces nuages sont formés, les fait ressembler à de véritables nuages parsemés d’étoiles brillantes. La voûte de cette caverne est chargée de festons de cristaux, de magnifiques stalactites et de concrétions pierreuses qui offrent aux yeux des figures bizarres, que 1 imagination rend plus merveilleuses encore. On serait même tenté de croire que l’art à contribué à la perfection de ces étonnantes images. Les naturalistes pourraient faire des remarques très-intéressantes, s’ils parvenaient à calculer combien de siècles il a fallu pour former des pyramides de 66 mètres d’élévation, par le seul concours de l’eau chargée de matières lapidifiquesqui tombe goutte a goutte de la partie supérieure de ces cavernes.

■ Une troisième salle, large, et surtout fort longue, représente assez bien une galerie tournante. Une voûte très-basse, que l’on appelle le Four à cause de sa forme, donne accès dans une autre salle dont l’aspect lugubre attriste l’œil. Un trou la fait communiquer avec une petite pièce dans laquelle jaillit, derrière des piliers, une source dont l’eau nous paraît délicieuse. Nous apercevons des cristallisations brillantes et blanchâtres qui se dessinent vaguement dans le fond noir de l’abîme. Devant nous un espace sans fin, et nulle^autre route qu’un rocher à pic de 10 mètres. Ce ne sont qu’affreux précipices. Nous entendons rouler de rocher en rocher les pierres que nous jetons dans cet abîme immense, et, après un long silence, nous les entendons de nouveau.

« Enfin, après des difficultés inouïes, nous atteignons une sorte de petit plateau d’où notre vue est d’abord frappée de 1 aspect d’un autel blanc comme la neige, de forme ovale, et assis sur des marches composées d’un émail éblouissant. Plus loin se montrent des colonnes cannelées, jaunes et transparentes malgré leur grosseur démesurée. La grandeur de cette salle est égale au quart de Montpellier. Son sol est hérissé d’aspérités, de colonnes, de pyramides ; mais nos yeux n’ont pu en mesurer ni l’élévation ni la grosseur.’ Des obélisques hauts comme des clochers, ciselés à la manière gothique et roussâtres, attirèrent longtemps nos regards. Ici des masses de la grosseur d’une maison qui se déploient en forme de cascades ou imitent des nuages ; là, de hardis piliers de cristal brillant et scintillant de mille feux à la lueur de nos flambeaux ; enfin tout ce que l’imagination peut enfanter de plus bizarre et de plus étrange se voit là. Nous avançons encore, et nous remarquons une statue colossale de 8 à 10 mètres, posée sur un piédestal, et représentant une femme qui tient un enfant dans ses bras ; c’est pourquoi on a appelé cette salle !a salle de la Vierge. Nous avons évalué la profondeur que nous avons parcourue à environ 200 mètres sous terre. »

GANGES (Marie-Elisabeth de Rossan, marquise de), héroïne et victime d’un des drames les plus sombres, les plus horribles et les plus émouvants qu’il soit’possible de rencontrer dans les annales du crime. Racontons brièvement et simplement le tragique épisode qui a rendu si tristement célèbre le nom delà marquise de Ganges.

Marie de Rossan naquit à Avignon en 1637, du sieur de Rossan et de la demoiselle de Joannis. Fort riche par sa mère, d’un esprit charmant", d’une sagesse exemplaire, d’une beauté éblouissante, et dont nous verrons bientôt les funestes effets, elle fut recherchée en mariage lorsqu’elle n’était encore qu’une enfant, et, à treize ans, elle épousait le marquis de Castellane, petit-fils du duc de Villars. Appelée à la cour par la haute position de son mari, ce fut, quand elle y parut pour la première fois, un cri général d’admiration, d’étonnement, devant la perfection idéale, divine de son visage : « Un teint animé des plus vives couleurs et d’une blancheur extraordinaire ; des cheveux extrêmement noirs et retombant avec grâce sur son sein d’albâtre ; les traits d’une vivacité, d’une régularité admirables ; des yeux grands, bien fendus, noirs comme le jais, mais brillants d’un feu, d’un charme irrésistibles ; une jolie bouche, de belles dents ; les Tbras, les mains, la taille, la démarche, le maintien en rapport parfait avec l’ordre, avec la noblesse de sa fig.ro ; • telle un de ses biographes nous peint la marquise de Castellane, d’après un portrait de Mignard. Ce portrait, un* des chefs-d’œuvre du peintre ordinaire des beautés du xvue siècle, nous nous rappelons l’avoir admiré, il y a douze ou quinze ans, dans une des salles du château de Ganges ; on peut le voir aujourd’hui au château de Saint-Laurent, distant de Ganges d’une lieue environ, et qui est habité par la famille do Juniê, branche de la famille de la belle et infortunée marquise.

Mais revenons à la toute jeune femme qui vient de faire à la cour de Louis XIV une entrée triomphale, éblouissante, comme uno apparition de fée. La reine de Suède déclare que jamais, en ses nombreux voyages, elle n’a rencontré une figure si parfaite ; d’une. commune voix, les courtisans la nomment la belle Provençale. Le roi, le roi lui-même, daigne laisser tomber sur elle ses regarda