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des langues orientales et sa" traduction des Mille et une nuits. Cette demoiselle était d’un grand mérite, et joignait à beaucoup d’esprit un caractère doux et enjoué. Gresset l’épousa, le 22 février 1751. Une grande conformité de caractère et de goûts les attacha facilement l’un à l’autre. Ils étaient tons les deux fort gais, aimant les contes plailants et les épigrammes, et ayant beaucoup 3e talent pour en faire. Gresset a composé seul une quantité de contes qui étaient autant de petits poSmes variés à l’infini, et quelques centaines d’épigrammes : dans le nombre il y en avait quelques-unes auxquelles le marquis de Chauvelin avait eu part ; mais rien n’en a été conservé... L’évêque d’Amiens était le seul qui fût en étnt de lutter contre Gresset dans le genre du conte. Ils se trouvaient souvent ensemble chez le duc de Chanlnes et ils y faisaient assaut à cette ^orte d’escrime, pendant cinq à six heures de suite. On oubliait le dîner ou le souper pour les entendre. Gresset avait surtout une facilité incroyable. Depuis l’âge de trente ans, il écrivait currenle calamo, en vers comme en prose. Avec tant de moyens de briller dans le monde, personne ne s’y montra jamais plus modeste que Gresset. If cherchait toujours à se mettre à la portée de chacun, et à faire valoir les autres, même à ses propres dépens ; aussi était-il généralement aimé... Gresset contracta en vieillissant un esprit de religion exagéré ; ces sentiments le portèrent, dans ses dernières années, à sacrifier plusieurs ouvrages qu’il avait achevés et à en abandonner d’autres qu’il avait commencés, en recommandant que Ion ne publiât jamais ce qui pourrait en rester après «i mort. Ses volontés n’ont été que trop scrupuleusement respectées à cet égard, et nous avons perdu des ouvrages précieux, savoir : deux comédies terminées, dont l’une, intitilée : le Secret de la comédie, avait été lue par lui à deux de ses amis, bons connaisseurs, qui assurent que rien de plus gai n’a été donné au théâtre ; l’autre portait ce titre : le il onde comme il est ; un cinquième et un sixième chant du poëine de Vert- Vert. Le cinquième, intitulé VOuwoir ou le Laboratoire de nos sœurs, est le seul connu. Gresset l’avait tu à une séance publique de l’Académie d’Amiens, en 1753, et à la cour, en 1775, lorsqu’il y alla en qualité de directeur trimestriel de l’Académie française, à la tête de cette compagnie, pour haranguer le roi et la reine sur leur avènement au trône. Ce chant coiitinuait le badinage des quatre premiers sur les amusantes frivolités des couvents de religieuses. On y voyait, entre autres choses, le récit d’une représentation de la tragédie à’Alhalie, donnée a l’occasion de l’année jubilaire de la mère supérieure. On choisit pour remplir le rôle du jeune roi Joas une jeune religieuse, fraîche et jolie ; mais la voici qui tombe malade juste au moment de la représentation. La mère Cunégonde, dont la dernière dent vient de tomber, veut à toute force remplacer la jeune religieuse, ce qui provoque une réclamation de tout le noviciat. La cause est portée devant le sanhédrin embéguiné. Il y est décidé qu’on ne doit pas contredire la révérende, de peur que son mécontentement ne trouble la fête ; et elle l’emporte sur toutes les novices. Ce tableau, dit-on, était achevé. Une épître adressée au marquis de Chauvelin, et dans laquelle Gresset peignait les mœurs oisives d’une abbaye, pouvait faire, dit le même biographe, le pendant de l’Ouvroir. La famille de Gresset a conservé les manuscrits d’un poëme en quatre chants, intitulé : le Gazetin, et d’un autre ptiëme en dix chants : le Parrain magnifique. Des raisons faciles à deviner empêchèrent la publication de ce second poème, dont voici le sujet. Un abbé d’un grand nom, mais qui est fort peu généreux, a promis de tenir sur les fours baptismaux le fils d’un de ses hommes d’affaires. Le moment arrivé, l’abbé pense que, s’il représente en personne, cela pourra lui coûter cher. Il prend doue le parti de se faire remplacer par le maire d’une petite ville voisine. Ce maire, un homme qui joue l’important, se trouve tout enorgueilli de l’honneur qu’on lui fait-, il dresse un état fort ample de toutes les cérémonies et de tous les frais du baptême, et il en fait monter la dépense à une trèi-grosse somme. Il présente cet état à l’abbé, qui réduit mesquinement la somme à 27 livres 10 sols. On trouve dans ce poëme une critique tine et ingénieuse, l’esprit et la gaieté ordinaires de Uresset ; miiis déjà commencent à se înninfester des symptômes de décadence. Du fond de sa retraite d’Amiens, il envoyait assez souvent à l’Académie des Epîires et des pièces fugitives, qui ont été insérées dans les recueils, mais dont le mérite baissait singulièrement ; quand il était appelé à remplir

ses fonctions de directeur par trimestre, il venait volontiers à Paris. C’est à cette occasion qu’il répondit aux discours de réception de d’Alembert et de Suard. Dans cette dernière séance, l’affaiblissement de son intelligence se manifesta visiblement ; il voulut parler du jargon du jour et faire un de ces petits fableaux de genre qu’il réussissait si bien autrefois ; mais ce fut vainement. " Il voulut peindre, dit d’Alembert, des ridicules dont il avait perdu le trait et les formes. Le public vit, avec un silence respectueux, et avec une sorte de douleur, le coloris terne et suranné de ces tableaux, comme il voit

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les derniers efforts de ces artistes célèbres dont la jeunesse s’est immortalisée par des chefs-d œuvre, et dont les mains défaillantes, encore attachées sur la toile qu’animait autrefois leur génie, essayent en vain d’y représenter, par quelques traits informes, des objets que leurs faibles yeux ne peuvent plus apercevoir. » Louis XVI accorda à Gresset, en 1775, des lettres de noblesse dont voici le préambule : « Les avantages que les sciences, les belles-lettres et les arts procurent à notre royaume nous invitent a ne négliger aucun des moyens qui peuvent contribuer à leur maintien et à leur progrès. Les titres d’honneur, répandus avec discernement sur ceux qui les cuiivent, nous paraissent l’encouragement le plus flatteur Que nous puissions leur donner. Parmi ceux de nos sujets qui se sont livrés a l’étude des belles-lettres, notre cher et bien amé Gresset s’y est distingué par des ouvrages qui lui ont acquis une célébrité d’autant mieux méritée, que la religion et la décence, toujours respectées dans ses écrits, n’y ont jamais reçu la moindre atteinte. Sa réputation a, depuis longtemps, engagé l’Académie française à le recevoir au nombre de ses membres., . Nous savons, d’ailleurs, qu’il est issu d’une famille honnête de notre ville d’Amiens, que son aïeul et son père y ont rempli différentes charges municipales, et qu’ils y ont toujours, ainsi que le sieur Gresset lui-même, vécu de cette manière honorable qui, eu rapprochant de la noblesse, est, en quelque sorte, un degré pour y monter. » Au commencement de 1777, Louis XVI fit Gresset chevalier de l’ordre de Saint-Michel, et Monsieur (depuis Louis XVIII) la nomma historiographe de l’ordre de Saint-Lazare. Gresset taisait tout le bien possible. Il avait consacré au soulagement des pauvres le produit entier d’une maison de campagne, appelée le Pinceau, qu’il possédait à une demi-lieue d’Amiens et où il allait fréquemment. Après sa mort, on découvrit une multitude de nécessiteux qu’il avait secourus, dans le plus grand secret, pendant une longue suite d’années. Sa perte fut regardée comme un deuil public dans la ville d’Amiens. Le corps municipal et l’Académie assistèrent à ses obsèques en grand cortège. Le.P. Daire, bibliothécaire des célestins, a publié une Vie de Gresset (Paris, 1779). L’Académie d’Amiens, non contente d’avoir célébré elle-même la mémoire du poëte dans un éloge public dû à Baron, secrétaire de la société, fit exécuter son buste par Berruer, sculpteur du roi, et l’inauguration en fut faite solennellement le 25 août 1787. La plupart de ses ouvrages furent imprimés séparément, à mesure qu’il les composait, dans les journaux du temps ; une grande partie fut recueillie de son vivant, et eut un nombre infini d’éditions. Les plus récentes et les meilleures, parmi les éditions complètes, sont celles de 1803 et de 1811. Campenon a donné ses Œuvres choisies en 1823.

GRESSET (Félix), philologue français, né à Fontarlier en 1795, mort à Saint-(Jrermainen-Laye en 1831. -Il embrassa la carrière de renseignement, devint membre de l’Académie des sciences de Toulouse, inspecteur de l’Académie de Grenoble, et mourut du chagrin que lui causa sa destitution après la révolution de Juillet. Outre des Dissertations philologiques, un Dictionnaire polyglotte resté manuscrit, etc., on a de lui un Essai sur la langue grecque ou Précis de sa formation, de sa grammaire et de Sa prosodie (Paris, 1825, ui-8°).

GRESSIER (Édouard-Valéry), homme d’Etat français, né en 1815. En sortant de l’École polytechnique, il fit ses études (le droit. Il professait alors des opinions très-avancées et se vit compromis, avec M. Raspail, dans une affaire politique qui n’eut pas de suites. Vers 1838, M. Gressier se fit inscrite comme avocat au barreau de Paris. Sans facultés brillantes, mais travailleur infatigable et doué d’un esprit net et pratique, il parvint à se faire une clientèle qui s’accrut considérablement lorsqu’il eut épousé la fille de M. Chaix d’Est-Ange. Il fut alors attaché comme avocat et comme conseil à diverses administrations, au ministère des finances, à l’enregistrement, à l’assistance publique, à la préfecture de la Seine. M. Gressier était membre du conseil général pour le canton de Coibie, lorsque, en 1863, il se présenta, avec l’appui du gouvernement, comme candidat au Corps législutif, dans la 5e circonscription de la Somme. Elu par 19,228 voix sur 28,662 votants, il alla complaisamment appuyer de ses votes à la Cbunbre cette triste politique impériale qui devait conduire la France au désastre de Sedan. Il vota contre l’abrogation de la loi de sûreté générale, contre l’amendement qui demandait que les maires fussent choisis parmi les conseillers généraux, pour la continuation de la guerre du Mexique, pour la nouvelle expédition de Rome, contre l’instruction gratuite, etc. M. Gressier était à peu près inconnu du public, lorsqu’il fut nommé, au commencement de 1868, rapporteur de la loi sur le recrutement de l’armée et de la garde mobile. Il fit preuve, dans la discussion de cette loi, de beaucoup d’adresse, de dextérité, montra un véritable talent d’assimilation, et attaqua même avec une certaine vivacité diverses parties du projet, qu’il vota néanmoins dans son ensemble. Lors du remaniement ministériel qui eut lieu le 17 décem GRET

bre 1868, il fut appelé au ministère du commerce, de l’agriculture et des travaux publics. Comme il était le premier ministre pris, depuis le commencement de l’empire, dans le sein du Corps législatif, sa nomination fut uccueillie avec faveur par ses collègues de la Chambre. À la suite du message impérial de juillet 1869, qui annonçait le retour a la responsabilité ministérielle, le cabinet ayant été remanié, M. Gressier garda le portefeuille des travaux publics, dont avaient été distraits l’agriculture et le commerce, et resta au pouvoir jusqu’au 2 janvier 1870. Il fut alors remplacé par le marquis de Talhouet et appelé à siéger au Sénat. L’année précédente, il avait été fait commandeur de la Légion d’honneur. La chute de l’empire l’a écarté de la scène politique.

GRESSLYE s. f. (grè-sll — de Gressly, n. pr.). Moll. Genre d’acéphales à coquille bivalve, voisin des pholadoinies, comprenant une douzaine d’espèces, toutes fossiles, dont la plupart appartiennent au terrain oolithique intérieur.

GRÉSY-SUR-AIX, village et commune de France (Savoie), cant. d’Aix-les-Bains, arrond. et à 19 kilom. de Chambéry ; 1,345 hab. Les eaux de la Baisse et du Siéroz, qui se réunissent près du village, — forment à leur rencontre une charmante cascade et font mouvoir plusieurs usines. M""1 de Broc, sœur de la maréchale Ney, péritàGrésy le 10 juin 1813 ; un monument a été élevé à sa mémoire. Des tombeaux et des inscriptions romaines se voient au pied d’une vieille tour»

GRÉSY-SUR-ISÈRE, bourg de France (Savoie), ch.-I. de cant., arrond. et à 14 kilom. S.-O. d’Albertville ; pop aggl., 1,179 hab.pop. tôt., 1,463 hab. Antiquités romaines.

GRÉTERIN (Théodore), administrateur français, né en 1792, mort en 1861. Il entra dans l’administration des finances, fut successivement chef de bureau, chef de division, directeur, président du conseil spécinl des douanes, conseiller d’État, membre de l’Académie des sciences morales etpolitiques( !855) et obtint, en 1860, un siège au Sénat. On a de lui des Rapports et des Mémoires sur des matières de douanes et de finances.

GRETNA, en écossais Groitney, hameau d’Écosse, comté et à 40 kilom. S.-E. de Dumfries, à 16 kilom. N.-O. de Carlisle. dans la paroisse de Springfield, près de la frontière d’Angleterre. Ce hameau est célèbre par les mariages qui s’y célèbrent en dehors des formalités imposées par la loi anglaise. V. l’article suivant.

GRETNA-GREEN (le forgeron de), personnage presque légendaire et à’ qui les récits des voyageurs ont fait une célébrité européenne. On se le représente d’ordinaire comme une sorte de Vulcain de village, secourable à l’amour, sous quelques traits qu’il se présente. & lui, et toujours disposé à river, entre l’enclume et le marteau, les fers des Léandre et i des Héro qui rencontreraient dans les lois anglaises un Hellespont infranchissable. Comme le Pyrrhus d''Anâromaque, il aurait vu brûler plus de feux qu’il n’en alluma dans sa forge ; le conjungn balbutié par lui aurait même sauvé de la foudre plus d’une Séinété. N’en déplaise aux cœurs enivrés de poésie, c’est un "vulgaire marchand de tabac (que Dieu vous bénisse ! ), et non un forgeron, comme on le croit communément, qui a imaginé et fondé les fameux mariages clandestins de Gretna-Green, ces faciles unions entre gens qui veulent se passer des formalités et des consentements ordinaires. Le nom de Gretna-Green est venu de ce que la maison de cet industriel ingénieux était située dans un pré (yreen), entre les villages de Gretna et de Springfield, sur la frontière d’Angleterre, Ce singulier personnage vivait encore en 1791, Son successeur, le forgeron sans doute, fit merveille ; rien qu’en une année, celle de 1815, il célébra soixante-cinq unions, qui lui rapportèrent une bénéfice net de 1,000 livres sterling (plus de 25,000 francs). Un aussi beau résultat fit naître la concurrence, concurrence facile, car personne n’ignore qu’en vertu d’une vieille coutume d’Écosse la bénédiction nuptiale peut valablement être donnée par le premier venu. On croyait généralement, il est vrai, même en Angleterre, que les mariages contractés à Gretna-Green étaient seuls valables, ou tout au moins qu’ils avaient quelque chose de plus légal que ceux qu’on contractait sur d’autres points du territoire écossais. C’est là une erreur. Gretna-Green n’a pour attirer les chalands que l’ancienneté de son enseigne et sa proximité de la frontière anglaise. Bien plus, il n’y a pas encore cent ans, on pouvait se marier partout, en Angleterre, en Écosse, sans justifier ni du consentement de ses parents, ni de la publication d’aucun ban. Le consentement mutuel, manifesté en

fn’ésence de.témoins, suffisait. En 1754, le ord chancelier Hardwicke fit voter par le Parlement une loi qui mit un terme à cette façon un peu patriarcale, mais d’ailleurs fort expéditive, de devenir mari et femme. Cette loi. appelée le Marriage actx a subi, depuis cette époque, diverses modifications ; mais elle existe toujours, malgré les attaques incessantes des partisans de la liberté absolue des mariages et l’opposition de Fox, qui était né d’une union clandestine (on appelait ainsi ces sortes de mariages). Mais comme elle n’était pas applicable à l’Écosse, il en résulta

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que les Anglais qui ne pouvaient point ou na voulaient point s’y soumettre passaient la frontière et échappaient ainsi à ses obligations. Ils allaient de préférence à Gretna-Green, qui se trouve situé tout près de la frontière, sur la route la plus fréquentée ; mais ils allaient aussi à Sprirgfield, à Annan, à Coldstream et dans quelques autres villages voisins de la- frontière, où la concurrence dont nous parlions tout a l’heure avait établi dans chaque auberge des fi.briques de mariages à prix réduits. On pouvait, dans les derniers temps, se marier pocr 5 ou 6 francs. C’était, on le voit, moins cher qu’au bureau, comme dirait un titi du boulnvard, et ce n’était vraiment pas la peine de rester célibataire, quand on pouvait pour une si faible somme entreren ménage. Ajoutez h cela qu’on pouvait même exiger par-dessus le marenéla bénédiction d’un prêtre. Chaque auberge des lieux cités plus haittavait, ei effet, son prêtre attitré, c’est-à-dire quelque industriel qui officiait à la vapeur, comms pour des gens pressés, et vous délivrait séince tenante, au nom de la divine Providence, un certificat signé par lui en présence de deux témoins, Au besoin, il lisait aux futurs époux l’office anglais du mariage ; mais cet’.e présence d’un ministre de l’Évangile, quelque peu coûteuse qu’elle fût, n’était pas même de rigueur ; on s’en passait très-volontiers, la loi d’Écosse reconnaissant qu’il y a mariaje dès que la cohabitation suit ou précède une simple déclaration devant témoins. Voici d’ailleurs dans quel sens étaient rédigés les certificats de mariage délivrés par le forgeron de Gretna-Green ou ses nombreux concurrents :

ROYAUME D’KCOSISE

Comté' de D um fries " Paroisse de Gretra.

« Les présentes sont pour certifier à tous ceux qui les verront que X"’, de la paroisse de..., dans le comté de..., et X’", de la paroisse de..., dans le comté de..., éti nt ici présents, et ayant déclaré qu’ils étaient célibataires, ont été mariés aujourd’hui, selon les lois de l’Écosse, comme l’attestent nss signatures.

Gretna-Hall, ce..., jour diJ...

Témoins... »

Il y avait environ quatre cents mariage3 contractés annuellement sans plus de cérémonie à Gretna-Green. Un certain Murray, garde-barrière établi sur la frontière, et qui n’avait qu’un seul pas à faire avec ses clients pour se trouver en état de procéder validement, avait porté un grand tort h, l’industrie de Gretna. Dans ses deux dernières années d’exercice, il avait célébré plu-i de 1,500 unions. Or, il avait exercé pendant treize ans, et les mariages se payaient fort chir. On a vu des lords chanceliers recourir au forgeron. Pénélope Smith fut ainsi mariée, ««n 1836, au frère du roi de Sicile, Charles-Ferdinand de Bourbon. Les enfants nés de ces riariages ne sont pas légitimes en Angleterre, ni aptes à hériter dans ce royaume. Eu 184’.i, une tentative fut faite dans le Parlement pour établir en Écosse la législation matrimoniale de l’Angleterre : la proposition fut repoussée à une assez forte majorité. Kn 1857, un acte du Parlement interdit ce genre de mariage à tous sujets britanniques not, domiciliés en Écosse ; mais il n’en existe pas moins une contrebande très-active ; Gretna, Springfield et autres localités de la frontière, possèdent encore des usines matrimoniales assez prospères.

GRÉTRY (André-Ernest-Mîdeste), célèbre compositeur et l’une des glcires de l’opéracomique français, né à Liège le 8 février 1741, mort à Montmorency, près Paris, le 24 septembre 1813. Son père, pauvre musicien employé comme violon à la collégiale de Saint-Denis, à Liégej fit entrer Ane ré, dès l’âge de six ans, comme enfant de chœur, a son église. Une faible constitution, que divers graves accidents débilitèrent encore, semblait lui interdire un travail assidu. La ridicule sévérité du maître de chapelle rebuta bientôt l’enfant, et on le crut incapable d’apprendre ta musique. Mais son père, qui connaissait sans doute la raison de cette apathie apparente et de ce dégoût, le retira de la maîtrise et le confia aux soins de Leclerc, homme intelligent qui, usant de douceur vis-à-vis de l’enfant, le rendit rapidement habile lecteur. À cette époque, une troupe de chanteurs italiens vint do.iner des représentations it Liège et y fit entendre les œuvres de Pergalèse et de Buranello. L’audition de ces compositions développa plus que toute autre cause l’instinct musical latent chez Grétry. Cet éveil de l’imagination se manifesta par la composition de ■ morceaux écrits en dépit des règles harmoniques, un motet et une espèce de fugue instrumentale. La famille et les amis crièrent

au miracle. Mais l’avantage le plus sérieux que l’enfant retira de ces esst.is informes fut que son père sentit la nécesshé de lui donner un maître d’harmonie. On le confia donc aux soins de Renekin, organiste de la collégiale ; puis le maître de chapelle de Saint-Paul, Moreau, lui donna quelques leçons de contrepoint. Mais il était déjà trop tard pour que Grétry s’astreignit à la discipline de l’école ; trop d’idées fermentaient dans sa tête pour lui laisser le temps de faire ample connaissance avec la doctrine ; il se dépêcha d’écrire six symphonies, qui furent exécutées à Liège avec succès.