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Page:Larrieu - Une poignée de vérités, 1920.djvu/20

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froid que les glaces empêchent toute communication. L’immense forêt-vierge couvre tout le sol qui ne produit rien. Il faut tout attendre de la France. » Elle envoie des vivres à ces malheureux mais pas toujours en assez grande quantité. Vous connaissez le proverbe : « loin des yeux, loin du cœur ! » À chaque saison nouvelle, dit un auteur, les pauvres « colons tournent anxieusement leurs regards vers l’océan, se demandant si les secours vont arriver. »

Maintes fois, la famine intervient avec son cortège de privations et de souffrances. Il faut défricher la terre pour qu’elle donne de quoi manger, il faut abattre ces arbres qui encombrent le sol de leurs racines robustes et séculaires. C’est à coups de hache qu’il faut d’abord l’éclaircir. Dans son langage imagé le colon se dit : « Il faut que je fasse de la terre, beaucoup de terre. » Et il cogne tant qu’il peut, il abat les géants de la Forêt. À mesure que celle-ci recule, il sème du blé, au milieu des souches en attendant. « Il a tout à faire, il fait tout par lui-même : cette immense tâche ne l’effraie pas. Le voilà maintenant qui arrache les souches, conquérant un arpent, deux arpents sur lesquels il sème le bon grain qui nourrira les siens. »

Ce travail ne se fait pas sans danger : les bêtes fauves, les gros moustiques ou maringouins sont là, guettant leur proie ; les sauvages indigènes, ces terribles Iroquois toujours prêts au meurtre et au pillage, menacent d’envahir le domaine si chèrement acquis.