Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome I.djvu/399

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sur les attraits de la princesse Pauline. Il a été convenu que c’était, sans contredit, la plus jolie femme de Paris. L’Empereur disait que les artistes s’accordaient à en faire une véritable Vénus de Médicis ; et comme on achevait de détailler ses attraits avec beaucoup d’élégance et de grâces, il a demandé tout à coup si une princesse du jour, chez nous, valait cela ; sur quoi quelqu’un s’est écrié que les attraits de madame la duchesse d’Angoulême étaient d’une nature toute différente ; ils étaient purement célestes : c’était la bonté, la douceur, la tendre charité, et surtout l’oubli et le pardon des injures. À ces mots, l’Empereur a avancé la main pour saisir l’oreille du malicieux interlocuteur. Heureusement pour celui-ci, la table de jeu l’en séparait.

Voici du reste, chemin faisant, une anecdote qui, si elle était vraie, serait bien propre à peindre les dispositions passionnées du château contre notre esprit d’égalité. Un Anglais, qui avait été fort de la connaissance de M. le comte d’Artois durant son exil, prenait congé de lui pour retourner en Angleterre, et lui disait qu’il espérait que, malgré la différence de nation, il lui continuerait ses bons souvenirs. « Que voulez-vous dire, Milord, avec notre différence de nation ? repartit vivement le prince ; il n’en est désormais que deux pour moi : la noblesse et la canaille. Milord, nous sommes de la même nation. ».

À la suite de ces conversations, l’Empereur demanda quelle était la date du mois ; c’était le 11 mars. « Eh bien, dit-il, il y a un an aujour-