Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome I.djvu/51

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ensuite au gouverneur, quand celui-ci sera arrivé ; et à moins qu’il n’y ait lieu à s’y opposer, ils donneront des ordres nécessaires, et paieront les dépenses par des billets tirés sur le trésor de Sa Majesté.

« En cas de mort (quelle prévoyance !!!), la disposition des biens du général sera déterminée par son testament, les contenus duquel, il peut en être assuré, seront strictement observés. Comme il pourrait se faire qu’une partie de sa propriété vînt à être dite celle des personnes de sa suite, celles-ci seront soumises aux mêmes règles.

« L’amiral ne prendra à bord personne de la suite du général Bonaparte, pour Sainte-Hélène, que ce ne soit du propre consentement de cette personne, et après qu’il lui aura été expliqué qu’elle devra être soumise à toutes les règles, qu’on jugera convenable d’établir pour s’assurer de la personne du général. On laissera savoir au général que, s’il essayait de s’échapper, il s’exposerait à être mis en prison (en prison !!!), ainsi que quiconque de sa suite qui serait découvert cherchant à favoriser son évasion. (Plus tard le bill du parlement soumet ces derniers à la peine de mort.)

« Toutes les lettres qui lui seront adressées, ainsi qu’à ceux de sa suite, seront données d’abord à l’amiral ou au gouverneur, qui les lira avant de les rendre ; il en sera de même des lettres écrites par le général ou ceux de sa suite.

« Le général doit savoir que le gouverneur ou l’amiral ont reçu l’ordre positif d’adresser au gouvernement de Sa Majesté tout désir ou représentation qu’il jugera faire : rien là-dessus n’est laissé à leur discrétion ; mais le papier sur lequel les représentations seraient faites doit demeurer ouvert, pour qu’ils puissent y joindre les observations qu’ils jugeront convenables. »

On se peindrait difficilement la masse et la nature de nos sentiments, dans ce moment décisif où s’accumulaient en foule tant de violences, d’injustices et d’outrages !

L’Empereur, contraint de réduire sa suite à trois personnes, arrêta son choix sur le grand maréchal, moi, MM. de Montholon et Gourgaud. Les instructions ne permettant à l’Empereur d’emmener que trois officiers, il fut convenu de me considérer comme purement civil, et d’admettre un quatrième, à l’aide de cette interprétation.


Conversation avec lord Keith – Visite des effets de l’Empereur – L’Empereur quitte le Bellérophon – Séparation – Appareillage pour Sainte-Hélène.


Lundi 7.

L’Empereur adresse à lord Keith une espèce de protestation nouvelle,