Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome I.djvu/729

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reux, disait Napoléon. Les Prussiens en souffraient visiblement. Napoléon était constamment entre les deux souverains : or, le roi pouvait à peine suivre, ou bien heurtait et gênait sans cesse Napoléon. Revenait-on, d’un saut les deux empereurs étaient à terre, et ils se prenaient par la main pour monter ensemble les escaliers. Mais comme Napoléon faisait les honneurs, il n’eût pas voulu rentrer avant d’avoir vu passer le roi : alors il fallait l’attendre longtemps, et, comme il plut souvent, il en résultait que les deux empereurs se mouillaient à cause du roi, au grand mécontentement de tous les spectateurs.

« Cette maladresse ressortait d’autant plus, disait l’Empereur, qu’Alexandre est plein de grâces, et se trouverait de niveau avec tout ce qu’il y a de plus aimable dans les salons de Paris. Alexandre se trouvait parfois si fatigué de son compagnon, qu’absorbaient ses chagrins en toute autre cause, que nous rompions de concert la société, pour nous délivrer plus tôt. On se séparait donc immédiatement après le dîner, sous prétexte de quelques affaires chez soi ; mais Alexandre et moi nous nous retrouvions bientôt ensuite pour prendre le thé chez l’un ou chez l’autre, et nous restions alors à causer ensemble jusqu’à minuit et au-delà. »

Alexandre et Napoléon se revirent quelque temps après à Erfurt, et se donnèrent les plus grandes marques d’affection. Alexandre y proféra hautement les sentiments d’une amitié tendre et d’une admiration véri-