Page:Laurenceau - Le Petit neveu de l'Arretin, ouvrage posthume trouvé dans le portefeuille de son grand oncle, BnF Enfer-373, 1800.djvu/69

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« Peux-tu dormir, dit-il, bâtard d’une déesse,
Quand le péril par-tout t’environne et te presse ?
N’entends-tu pas le vent qui t’invite à partir ?
Insensé ! ta putain, digne fille de Tyr,
Pleine d’un foutre aigri qui dans son sein fermente,
Médite une vengeance, et terrible et sanglante ;
Fuis lorsque tu le peux ; sache que si demain
L’aube, encore en peignoir, ne te trouve en chemin,
En flots séditieux le peuple de Carthage
Va, la torche à la main, inonder le rivage :
Crains tout ; connais la femme et ses vœux inconstans ;
L’orage dans son cœur est voisin du beau tems. »
À ces mots l’huissier — dieu dans la nuit se replonge ;
Énée épouvanté de l’horreur de ce songe,
Et le cœur agité d’un violent tic-tac,
Saute, en criant d’effroi, du fond de son hamac.
De la main gauche il prend son pentalon de serge ;
De la droite il saisit sa pucelle flamberge,