Page:Laveleye - Les Nibelungen.djvu/155

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Siegfrid. Si j’avais connu vos ruses d’assassin, j’aurais bien su défendre ma vie contre vous. Mais ce que je regrette le plus, c’est dame Kriemhilt, ma femme.

« Maintenant, que Dieu ait pitié du fils qu’il m’a donné, auquel on reprochera plus tard que des gens de sa famille ont assassiné un homme. Si j’en ai la force, voilà ce que je veux amèrement déplorer.

« Jamais, dit-il au roi, on n’a commis meurtre plus horrible, que celui dont je tombe la victime. Je vous conservai la vie et l’honneur dans vos plus pressants dangers. J’ai payé bien chèrement tous les services que je vous ai rendus. »

Alors le guerrier blessé à mort ajouta tristement : — « Voulez-vous, noble roi, faire encore quelque chose de loyal en ce monde ? Laissez-moi confier à votre merci ma chère bien-aimée.

« Qu’elle puisse jouir de l’avantage d’être votre sœur. Elle a toujours été ma compagne fidèle, pleine de royales vertus. Mon père et mes guerriers vont m’attendre longtemps ! Non, jamais on n’a traité si cruellement un ami dévoué. »

Sous l’étreinte de la douleur il se tordait affreusement ; il parla d’une voix lamentable : — « Il se peut que plus tard vous vous repentiez de ce lâche assassinat. Croyez-en ma parole véridique, vous vous êtes frappés vous-mêmes. »

Tout autour de lui les fleurs étaient baignées de sang. Il luttait contre la mort. Mais bientôt tout fut fini. L’arme homicide l’avait atteint trop profondément. Il devait mourir là, le guerrier vaillant et magnanime.

Quand les chefs virent que le héros était mort, ils le mirent sur un bouclier d’or rouge ; puis ils se consultèrent