Page:Laveleye - Les Nibelungen.djvu/161

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sance ; c’est pourquoi je ne veux pas vous conseiller la lutte ; ils seraient trente contre un. Que Dieu leur rende largement tout le bien qu’ils nous ont fait !

« Ainsi demeurez ici et souffrons ensemble cet affreux malheur. Quand il commencera à faire jour, tous m’aiderez, guerriers magnanimes, à ensevelir mon époux chéri. » Les guerriers répondirent : — « Qu’il soit fait ainsi, maîtresse bien-aimée. »

Personne ne peut vous redire comme on entendit se lamenter misérablement les femmes et les chevaliers, tellement que toute la ville ouït leurs gémissements. Les nobles gens de la ville accoururent en hâte.

Ils pleurèrent avec les étrangers ; car c’était pour eux une grande peine. Ils ignoraient pour quelles offenses Siegfrid, le noble héros, avait perdu la vie. Les femmes des bons habitants du bourg pleurèrent avec celles de la reine.

On ordonna à des forgerons de faire en hâte un cercueil d’or et d’argent, très grand et très fort, réuni par des plaques de bon acier. L’âme de chacun était profondément attristée.

La nuit était passée, on annonça le jour. La noble dame fit porter à la cathédrale le seigneur Siegfrid, son époux bien-aimé. Tout ce qu’il avait là d’amis suivait en pleurant.

Quand on le porta dans l’église, que de cloches sonnèrent ! On entendait de toutes parts le chant de maints prêtres. Vinrent aussi le roi Gunther avec ses hommes, et le féroce Hagene ; ils eussent mieux fait de s’en abstenir.

Le roi dit : — « Chère sœur, hélas ! quelle souffrance est la tienne ! Que n’avons-nous pu échapper à ce grand