Page:Laveleye - Les Nibelungen.djvu/336

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« À quoi nous sert, roi Etzel, que nous ayons donné au héros tout ce qu’il a désiré ? Maintenant il a mal agi. Celui qui devait nous venger, veut faire la paix. » Volkêr répondit à ces paroles, le très beau guerrier :

— « Hélas ! noble femme du roi, il n’en est pas comme tu le prétends. Si j’osais dire qu’une aussi grande dame en a menti, je dirais que vous avez prononcé sur le compte de Ruedigêr des mensonges diaboliques. Lui et ses guerriers ont été tristement déçus touchant la paix.

« Il a exécuté si vaillamment les ordres du roi, que lui et sa suite sont tombés morts ici. Maintenant, Kriemhilt, regarde autour de toi : à qui vas-tu donner tes ordres ? Ruedigêr, le héros, vous a servis jusqu’à sa dernière heure.

« Si vous ne voulez pas me croire, on vous le fera voir. » Alors, afin de lui briser le cœur, on apporta le héros, la tête fendue, là où le roi pouvait l’apercevoir. Jamais les fidèles d’Etzel n’éprouvèrent plus grande affliction.

Quand ils virent apporter le corps du margrave, nul écrivain ne pourrait ni décrire, ni raconter les effroyables gémissements que les hommes et les femmes poussèrent en ce moment, l’âme en proie au désespoir.

Le désespoir d’Etzel n’était pas moindre. Le puissant roi poussait des cris de douleur semblables au rugissement du lion. Ainsi faisait aussi sa femme. Ils se lamentèrent effroyablement sur la mort du bon Ruedigêr.