Page:Lavergne, Jean Coste - 1908.djvu/19

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core une des plus affriolantes et avait dû, maintes fois, subir des propositions honteuses quoique aussitôt vertement repoussées.

Si frêle et si mignonnette, elle aurait dorénavant assez de soucis, rien qu’à s’occuper du ménage et des enfançons. Par ailleurs, dans son égoïsme d’amoureux, Jean tenait à trouver, en rentrant, sa femme fraîche, reposée, respirant le calme et la joie, prête à lui faire un doux et chaud intérieur, sans qu’aucun ennui du dehors la tourmentât. Tout cela valait bien les quelques centaines d’écus que Louise gagnait si péniblement, par an, dans sa mercerie, à rester debout, du matin au soir, derrière un comptoir. Cet argent, en outre, aurait à peine suffi à payer les gages et les inévitables gaspillages d’une bonne prodigue et revêche qu’auraient nécessitée désormais les menus soins à donner aux enfants. Doué d’un caractère insouciant, préférant sa tranquillité complète à tout supplément de gain, Coste ne pensait guère aux charges de l’avenir et se croyait suffisamment riche avec ses dix-sept cents francs.

Dès lors, réduits au traitement de Jean pour unique ressource, ils vécurent assez petitement, joignant juste les deux bouts, car les enfants coûtaient gros, sans qu’il y parût. Cependant Louise, qui conservait un brin de coquetterie, trouvait moyen d’être bien frisottée et requinquée, le dimanche, pour se promener, pimpante et triomphante, au bras de son mari en redingote et haut de forme, devant ses anciennes compagnes, appariées, elles, à des artisans, et qui la jalousaient beaucoup.