Page:Lavignac - Le Voyage artistique à Bayreuth, éd7.djvu/125

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

voudrait les retrouver. Vénus lui rappelle quelles souffrances il endurait sur cette terre et les compare aux joies qu’il goûte à présent auprès d’elle. Elle l’engage à prendre sa harpe et à chanter l’amour, l’amour qui lui a conquis la déesse de la beauté.

Saisissant résolument l’instrument, il célèbre les enivrantes extases de la volupté que la déesse, faisant de lui l’égal des dieux, lui a prodiguées si généreusement ; mais son chant se termine par un cri de lassitude : il ne veux plus de ces ivresses et demande à s’en éloigner pour jamais. En vain l’enchanteresse veut-elle le retenir, menaçante, suppliante tour à tour. Par deux autres fois il entonne l’hymne dans lequel il exalte la beauté de sa reine et les enchantements de son empire, jurant de les chanter toujours ; mais son aspiration à voir la fraîche nature, les bois verdoyants, devient de plus en plus impérieuse ; il supplie la déesse de le laisser partir.

En proie à une violente colère, elle y consent enfin, le menaçant de toutes les douleurs sur cette terre qu’il veut absolument revoir, et souhaitant dans sa haine qu’il regrette amèrement le séjour qu’elle lui avait fait si doux et qu’elle lui ferme à tout jamais ; puis, par un prompt retour, elle cherche à le retenir encore, se faisant de nouveau séductrice et enveloppante.

Le chevalier n’aspire qu’à la régénération, au repentir, à la mort ; animé d’une exaltation toujours croissante, il appelle à lui, dans un élan plein de ferveur, le secours de la Vierge Marie.

Sa prière, entendue sans doute de la divine protectrice, rompt l’enchantement qui le tenait asservi : un coup formidable se fait entendre ; le royaume de volupté disparaît soudain, et le pécheur, délivré, se trouve tout à coup dans la belle vallée que domine, à droite, la Wartburg.