Page:Lavignac - Le Voyage artistique à Bayreuth, éd7.djvu/247

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qu’il a respecté en Brünnhilde l’épouse de Gunther. Il l’affirme solennellement sur l’arme que lui présente Hagen : qu’il périsse par cette arme même, s’il a forfait à l’honneur.

Scène v. — Brünnhilde s’avance, indignée, terrible, appelant la vengeance, par ce fer aigu et tranchant, sur le traître et le parjure, et tandis que Siegfried s’éloigne, insouciant de ses menaces et ne songeant plus qu’à sa nouvelle fiancée, qu’il entraîne dans le palais, la malheureuse créature, restée en proie à la plus affreuse des douleurs, se demande avec angoisse de quel cruel sortilège elle a été la victime, quel est l’astucieux ennemi qui lui a suscité une pareille infortune et comment elle dénouera, maintenant qu’elle a perdu sa science divine, les liens odieux qui l’enserrent. Hagen s’approche alors de la pauvre abandonnée et lui offre le secours de son bras pour la venger ; mais à cette proposition elle rit amèrement : n’a-t-elle pas elle-même pris soin de rendre le héros invulnérable ? et d’ailleurs sa bravoure ne paralyserait-elle pas quiconque voudrait se mesurer avec lui ? — Hagen connaît son infériorité dans une telle lutte ; mais n’y aurait-il aucun moyen secret de vaincre le coupable ?

Brünnhilde lui révèle alors qu’un seul point est attaquable, qu’elle n’a point compris dans ses enchantements, sachant bien que jamais il ne tournera le dos à l’ennemi : si Hagen peut l’atteindre entre les épaules, il lui portera là un coup mortel. — Le misérable se promet de profiter du précieux avis ; il fait part de son projet à Gunther, resté à l’écart, abîmé dans ses pensées et accablé par l’accusation de lâcheté que porte contre lui son épouse. Gunther frémit à la pensée de trahir celui qu’il a nommé son frère d’armes ; mais Hagen cherche à endormir ses remords : il lui rappelle à voix basse quelle puissance découlera