Page:Lavignac - Le Voyage artistique à Bayreuth, éd7.djvu/328

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Il est impossible de dire plus clairement en musique qu’Ortrude projette d’insinuer perfidement dans l’âme d’Elsa des doutes sur la pureté et l’origine de son chevalier, et veut lui inspirer la curiosité de percer le mystère dont il tient à entourer son nom.

Quand on en pénètre le sens intime, ce sombre et ténébreux épisode constitue l’une des plus belles pages de l’œuvre. Il se termine par une terrible phrase d’imprécation, chantée à l’octave par les deux voix, et qui scelle leur odieux pacte de vengeance.

Elsa paraît et exhale une suave cantilène ; dans la seconde partie de son Duo avec Ortrude on reconnaît à l’orchestre le motif du Doute, immédiatement suivi du Mystère du nom ; les projets ténébreux s’accomplissent, le venin est inoculé et fera son œuvre.

Le jour se lève. De longues sonneries de fanfares se font entendre, se répondant de tour en tour, sur les notes de l’accord ré-fa #-la, puis, quand subitement le ton d’ut lui succède, c’est L’Appel du Roi qui résonne. Aussitôt après, le ton de ré reparaît. Procédé audacieux, d’un effet saisissant. Dans cette scène comme dans celles qui suivent : Elsa se rendant à l’église, l’irruption scandaleuse d’Ortrude, l’arrivée du Roi et de Lohengrin, il n’est fait aucun emploi des Leit-motifs, jusqu’à la scène v, qui débute par L’Appel du Roi, immédiatement suivi du motif de Lohengrin ; puis, lorsque Frédéric s’avise d’attribuer à la ruse ou à la magie la victoire de son adversaire, signalons une réapparition du Jugement de Dieu, qu’on ose suspecter.

Ensuite, et successivement jusqu’à la fin de l’acte, reparaissent dans l’orchestre : Le Doute, Le Mystère du nom, Les Projets ténébreux ; puis, au moment où le Roi va franchir, avec Elsa et Lohengrin, le seuil de l’église, retentit