Page:Lavignac - Le Voyage artistique à Bayreuth, éd7.djvu/95

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cessaire, on procéda, en grande solennité, à la pose, par Wagner lui-même, de la première pierre du Théâtre des Fêtes. Cela eut lieu le 22 mai 1872 (cinquante-neuvième anniversaire de la naissance de Wagner).

À cette occasion, un concert fut donné dans la salle si élégante des anciens margraves de Bayreuth ; on y exécuta la Kaisermarsch et la Symphonie avec chœurs de Beethoven, avec quelques adjonctions qui ne sont peut-être pas absolument respectueuses ; c’est un détail.

Plus de quatre cents artistes allemands, tant chanteurs qu’instrumentistes, étaient accourus à cette cérémonie imposante, à l’issue de laquelle Wagner adressa une véritable proclamation à ce vrai petit peuple d’artistes.

Les travaux furent aussitôt commencés, sous la direction des architectes Runkwitz et Brückwald ; mais l’argent manqua, les souscriptions n’arrivaient plus ; sans hésiter, Wagner se mit en campagne et donna, dans les plus grandes villes d’Allemagne, des concerts qui rapportèrent près de 250,000 francs, un concert à Pesth, avec Liszt, plusieurs à Vienne ; de plus, il accepta de composer une Marche de Fête en vue de l’ouverture de l’Exposition universelle de Philadelphie, en 1876, qui lui fut payée 25,000 francs ; tout cela allait à la caisse de Bayreuth, mais eût encore été insuffisant sans une nouvelle générosité de Louis II, qui avança la somme manquante, se réservant de se rembourser sur les actions vendues ultérieurement.

Ce n’est donc qu’au bout de quarante ans de luttes et d’efforts incessants que Wagner vit se réaliser le projet colossal qui germait en lui depuis 1836, et peut-être avant. Voilà une belle leçon de persévérance et un bon sujet de méditation à l’usage des gens au découragement trop facile