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LE PÈLERIN DE SAINTE ANNE.

mentent et le monstre crie toujours : Viens ! viens !… Au dessous d’elle Geneviève voit un faible arbrisseau, que la vague sablonneuse essaie d’engloutir. C’est le seul qu’il y ait sur toute la surface mobile de la côte : Si je pouvais me cramponner à cette tige ! pense-t-elle !… Une sueur froide mouille ses tempes ; ses cheveux défaits tombent comme le feuillage après la pluie ; sa bouche est haletante, et ses yeux s’ouvrent secs et hagards. Le sable roule toujours. Geneviève se sent évanouir. Tout à coup sa main égarée saisit quelque chose : c’est l’arbrisseau. Elle s’y cramponne avec l’énergie du désespoir. Un blasphème monte du pied de la côte. Peu à peu le rameau que tient la fille infortunée se change en une main ; puis un bras se forme, puis le tronc devient le corps d’une femme toute belle, et la cime et le feuillage ; une tête richement couronnée de cheveux. Geneviève reconnaît son amie la défunte femme de Letellier.

— Sauvez-moi, dit-elle, ah ! sauvez-moi !

— Tu veux que je te sauve, et tu vas laisser périr mon enfant… Mon enfant bien-aimée est entre les mains des méchants, et ils vont la