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LE PÈLERIN DE SAINTE ANNE.

IX.

L’AUBERGE DE L’OISEAU DE PROIE.


Située rue Champlain, en face d’une maison à louer, à côté d’une autre trop remplie de locataires bruyants, l’auberge de l’Oiseau de proie était comme toutes les auberges de dernière classe : sale, petite, enfumée, mal éclairée, mal aérée. Elle avait pour enseigne un oiseau quelconque au bec crochu, aux griffes mordantes. Cet oiseau, taillé dans un bloc de bois et peint en rouge, tenait victorieusement un autre oiseau plus petit, qu’une couche de peinture blanche faisait passer pour une colombe. Les gens de cage et les filous la fréquentaient. On y buvait jusqu’à demander grâce ou à rouler sous les tables ; mais on n’y buvait que des boissons frelatées, baptisées et poivrées. On y mangeait peu, précisément parce qu’on y buvait beaucoup.

Le quinze octobre de l’an mil huit cent quarante, vers midi, sept jeunes garçons étaient assis et fumaient auprès du comptoir dépeinturé. C’étaient Picounoc dont personne ne savait le