Page:LeMay - Picounoc le maudit, Tome II, 1878.djvu/25

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guère à prier, mais il repassa mille fois dans son esprit, tout le travail qu’il avait fait, toutes les ruses qu’il avait employées, tous les moyens qu’il avait appelés à son aide pour atteindre ce but si ardemment convoité. Il se trouvait payé de ses veilles et de ses peines, de sa persévérance et de son dévouement. Ô que l’amour d’une personne aimée est d’un grand prix ! Et combien dépensent toute leur vie et toute leur énergie à rechercher cet amour qu’ils ont entrevu dans leur rêves de jeunesse ! Et combien aussi, dès que leurs vœux sont remplis, dès qu’ils ont porté à leurs lèvres ardentes la coupe de la volupté, s’écrient avec le plus heureux et le plus sage des hommes : Vanité des vanités !

— Restez, monsieur, dit Marguerite, à son tour, d’une voix qu’elle rendait bien aimable.

Le grand-trappeur enveloppa la jeune fille d’un regard profond et triste. Elle rougit et ce regard lui fit mal. Elle eut comme le pressentiment d’un grand malheur. Elle ne savait pourquoi, mais soudain elle voulait voir cet homme s’éloigner. Et lui, il la regardait toujours, et il y avait une immense pitié dans ses yeux : Je reste, dit-il, cela me fait plaisir.