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PICOUNOC LE MAUDIT.

— Oh ! oh ! commença-t-il.

Il n’acheva pas. Une main vigoureuse le saisit à la gorge et le coucha sur le lichen. Il se tordit comme un serpent dont on écrase la tête, et son fusil lui échappa. Ses bras se raidirent et ses poings fermés essayèrent de frapper l’ennemi qui le tenaillait ainsi, mais rien ne put faire desserrer les doigts musculeux du grand-trappeur. La pieuvre ne tient pas mieux sa victime dans ses dix bras visqueux armés de suçoirs. L’indien se déchirait les pieds sur le rocher, et ses ongles emportèrent un morceau de la veste du chasseur. Ses yeux sortirent de leurs orbites, et sa langue flotta en dehors de la bouche. Ses membres qui s’étaient d’abord roidis avec violence, s’affaissèrent peu à peu et ses doigts crispés se détendirent. Le trappeur desserra les doigts et le cadavre roula à côté de lui.

— Et d’un ! pensa-t-il…

On se mit à danser sur le sable, devant le feu. Déjà l’ivresse commençait à transformer ces sauvages, et, de singulières fureurs passaient dans leurs regards. Ils chantaient en dansant, et battaient la mesure en se frappant