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AUTOUR DE LA MAISON

chaient adroitement ; et ils frappaient aussi sur les maisons, à coups de sac, pour ébranler la frange glacée que le soleil de mars avait minée toute la journée. C’était une jolie dégringolade. Toto et Pierre se sauvaient agilement pour éviter l’avalanche, et ensuite nous ramassions chacun une provision.

Alors, les gens avaient beau sortir et nous traiter « d’haïssables » et de mal élevés, cela nous était parfaitement égal. Voyez-vous bien le tableau : cinq ou six petits enfants qui cheminent sur la route battue ou dans la rue en suçant fièrement leur glaçon ? C’est à qui le rendra plus pointu, aussi fin qu’un crayon, et clair et bien poli. On l’enfonce à maintes reprises jusqu’au gosier et il en sort adouci, affiné, luisant. Et les petites langues roses lèchent encore, en agaçant : « Regardez, c’est moi qui ai le plus beau ! » Parfois, sous les dents qui mordent malgré elle, un glaçon se casse et son petit propriétaire s’arrête, et recommence à viser le bord des toits avec les mottons de neige dure ! S’il atteint le plus long et le plus gros, il en fera une merveille, un énorme crayon de vitre transparente.

La neige est blanche et lustrée, parce que le soleil l’a un peu fondue. La campagne est paisible. Le ciel est bleu et se nuance déjà