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AUTOUR DE LA MAISON

la petite fille pourquoi cela. Elle me dit que c’était pour faire cuire des dindes. Je ne la crus pas et pensai à quelque bonne fricassée de sorcière, au bord de l’eau, la nuit.

Je questionnai la petite fille sur les jouets qu’elle allait me montrer. Elle osa dire : « J’sais pas si mouman va vouloir que je les sorte. » Je la suivis cependant. Par la cour, on entra dans la cuisine, une grande pièce à plancher jaune, obscure à cause du soir qui venait déjà. Sa mère fricotait. La maison sentait les animaux, le voisinage de vaches, de porcs, de poules. Je n’aimais pas cela. La petite fille s’en alla « en avant », toute seule, et me laissa sur une chaise boiteuse. Elle revint avec un poêle en tôle, peint en rouge, qui avait un tuyau et un tambour chauffeur, mais qui valait au plus trois gros deux-sous ! tandis que le mien était en vrai fer et pouvait endurer une attisée !

Je lui demandai sa poupée merveilleuse, et elle me dit : « Ben, j’peux pas te la montrer. On va aller voir les moutons à la place, veux-tu ? » J’acceptai, certaine maintenant que la petite fille s’était vantée et n’avait pas de poupée. Nous traversâmes la cour, le jardin, et, enfin, dans un champ, je vis les moutons. Ils étaient stupides, d’un blanc jaune et sale. Ils avaient l’air tocson, ne ve-