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AUTOUR DE LA MAISON

l’étouffait. Il demanda un « manche à balai », et il martyrisa la pauvre bête en le lui poussant dans la gorge…

Ce n’était ni une pomme, ni une patate, mais une tumeur ; et elle mourut le lendemain soir, dans la cour, d’où elle ne voulait plus partir. Le matin suivant, de la fenêtre, nous la vîmes étendue sur le côté, gonflée, laide…

On voulait nous empêcher de la regarder, mais Toto y tenait, car on allait l’embarquer sur une voiture. Et je restai, moi aussi, parce que Toto insinuait que j’avais peur…

La pauvre “Georgette”, qu’elle me fit mal au cœur ! D’abord, c’était si triste qu’elle fût morte ! On était accoutumé à la voir revenir du pacage, le soir, après cinq heures, paisible et lente, agitant sans cesse sa longue queue et sa langue, pour chasser les mouches sur ses flancs qui tressaillaient. Et puis, c’était notre vache, on savait qu’elle nous reconnaissait et qu’elle ne nous ferait aucun mal. Elle avait un air particulier pour nous regarder avec ses yeux de bête, pleins de bonté !

Maintenant, des hommes arrivaient en voiture. Ils firent une pente avec des madriers appuyés à la charrette, et la vache fut attachée, tiraillée, et hissée sur les planches