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Page:LeNormand - La plus belle chose du monde, 1937.djvu/233

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CHOSE DU MONDE
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Mais le rayon de soleil s’appauvrissait et percevant confusément ce tourment, Jean demandait :

— Mais qu’avez-vous donc, Lucette ? Des ennuis ? Des tracas ?

— Je n’ai rien. Je suis peut-être fatiguée, répondait-elle.

Puis elle allongeait le récit de ses courses, de ses heures de travail. Une fois de plus, elle reculait devant l’occasion offerte. Au fond, ce qu’elle espérait, c’était un miracle ; un événement surviendrait à point pour tout arranger. De sa propre initiative elle ne modifierait pas le choix enthousiaste de ses dix-huit ans. Tout supporter plutôt que de céder au caprice de son cœur. Elle priait, offrait ses angoisses à Dieu, multipliait les pénitences. Elle aurait bien aimé prendre conseil. Jamais elle n’avait su parler des choses qui l’atteignaient profondément et elle gardait malgré elle, avec cette rigueur, son déchirant secret.

Éternel jeu des contradictions, Guy s’attachait d’autant plus fermement que des obstacles plus nombreux se dressaient entre eux. Il simulait volontiers l’amitié, mais cette amitié avait la même saveur que l’amour. Il savait Lucette captive ; ses yeux suppliants indiquaient le senti-