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traitent, à chaque occasion, comme un simple troupeau d’esclaves. Leurs délégués ne prennent même pas la peine d’expliquer les ordres donnés, celui de se mettre en grève par exemple. Si quelque ouvrier un peu indépendant esquisse une résistance, il est vigoureusement assommé par les camarades obéissant avec une parfaite servilité aux injonctions du comité. L’ordre du délégué remplace ainsi le fouet du commandeur sur les plantations jadis cultivées par les nègres.

La plus invraisemblable fantaisie préside souvent à ces grèves. La preuve en est fournie par un des membres les plus influents de la C.G.T., monsieur Victor Griffuelhes dans son opuscule Voyage d’un Révolutionnaire. Voici comment il s’exprime :

À Marseille, sur les quais, il y avait par chantier un délégué par le Syndicat. Il avait un pouvoir grand… trop grand. Pour un rien, je dis pour un rien, souvent ce délégué lançait en plein travail un coup de sifflet. C’était le signal, chacun devait quitter le chantier, c’était la grève. Pourquoi ? Tout le monde l’ignorait, patrons et ouvriers.

De tels aveux montrent avec quelle facilité se peuvent asservir les foules ouvrières dès qu’on possède du prestige.

Leur obéissance va jusqu’à une abnégation que n’auraient jamais exigée les pires despotes. On connaît l’aventure récente de ce patron briquetier des environs de Paris qui, voulant se retirer et n’ayant pas d’héritiers, offrit à ses ouvriers de mettre son usine en actions et de les leur distribuer en restant gérant pour quelque temps afin de ne pas laisser l’affaire péricliter. Les briquetiers acceptèrent avec enthousiasme, mais la C.G.T. intervint et, redoutant cet exemple d’accord entre patrons et ouvriers, donna l’ordre impératif à ces derniers de refuser le présent. Ils obéirent sans discussion. Guéri de sa philanthropie, le patron ferma l’usine.

Les méthodes gouvernementales employées par les chefs syndicalistes ne constituent pas assurément une innovation, puisqu’elles furent celles de tous les anciens tyrans. Il fallait une grande confiance dans la servilité des multitudes pour oser les appliquer de nos jours.

Comment se maintient ce pouvoir nouveau qui prétend remplacer tous les autres ? Les syndicalistes révolutionnaires n’ayant à tenir compte ni de la volonté populaire, ni des lois, d’ailleurs de plus en plus fléchissantes devant