Page:Le Bon - Psychologie politique et défense sociale.djvu/252

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montre qu’il a fallu des siècles de luttes et des fleuves de sang pour ébranler la puissance de certains fantômes.

À aucune époque, le sort des classes populaires ne fut plus favorisé qu’aujourd’hui, comme l’a fort bien montré récemment l’enquête de monsieur d’Avenel. À aucun âge, cependant, elles ne firent entendre des plaintes plus vives.

Les divergences d’intérêts seraient faciles à concilier. Ce qui reste inconciliable, ce sont les haines et les jalousies semées par des politiciens flattant bassement les foules. Nous en voyons maintenant l’éclosion.

La contagion mentale a rendu le mécontentement universel. Le socialisme, il y a peu de temps, le syndicalisme et l’anarchisme, maintenant, sont devenus les panacées offertes à tous les maux.

Les foules imprégnées des nouvelles doctrines, se composent d’un mélange hétérogène d’arrivistes fervents, de fanatiques convaincus, d’universitaires aigris, d’humanitaires larmoyants et d’une masse immense de doux imbéciles qui suivent tous les mouvements parce que leur faible mentalité les condamne à toujours suivre quelque chose.

Les croyances actuelles : collectivisme, anarchisme, syndicalisme, etc., sont fondées uniquement sur les visions que leurs disciples ont de l’avenir. Ces visions restent forcément chimériques, l’avenir nous étant fermé, mais elles n’en constituent pas moins de puissants mobiles d’action.

L’audace croissante des partis révolutionnaires provient surtout de la grande pusillanimité des gouvernants dont l’humanitarisme craintif est tout à fait néfaste.

Aucune illusion sur les résultats de cette faiblesse ne reste possible. Dans son intéressant livre : Réflexions sur la violence, monsieur Georges Sorel, défenseur désabusé des doctrines socialistes, s’exprime ainsi :

Le facteur le plus déterminant de la politique sociale est la poltronnerie du Gouvernement… Il n’a pas fallu beaucoup de temps aux chefs des syndicats pour bien saisir cette situation… Ils enseignent aux ouvriers qu’il ne s’agit pas d’aller demander des faveurs mais qu’il faut profiter de la lâcheté bourgeoise pour imposer la volonté du prolétariat… Une politique sociale fondée sur la lâcheté bourgeoise qui consiste à toujours céder devant la menace de violences, ne pouvait manquer d’engendrer l’idée que la bourgeoisie est condamnée à mort et que sa