Page:Le Bon - Psychologie politique et défense sociale.djvu/64

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tièrement de cet impôt évidemment destiné d’ailleurs à retomber sur eux.


Sous l’influence dominante de ces fantômes, et surtout de celui de la peur, on a gouverné, depuis 20 ans, presque exclusivement au profit de la classe ouvrière, ne cessant d’irriter la paysannerie et surtout le commerce et l’industrie par des lois vexatoires et des menaces d’impôts plus vexatoires encore.

C’est la peur seule qui fit légiférer sans cesse le Parlement au profit d’une seule classe contre celles qui, précisément, représentent la force et la gloire du pays. Dépouillant les uns sous prétexte de religion, persécutant les autres sous prétexte de richesse acquise, toujours il fut mené par le fantôme de la peur. Peur de l’Église, peur des ouvriers, peur des socialistes révolutionnaires pour en arriver enfin à l’humiliante terreur des ronds-de-cuir.

A-t-on au moins par tant de lois vexatoires conquis les sympathies des travailleurs, aux chefs desquels on cédait chaque jour ? Personne n’ignore que le gouvernement a surtout récolté leurs haines. Les foules ne sont jamais reconnaissantes de ce qu’elles obtiennent par des menaces.

Il subsiste cependant, ce gouvernement si décrié, mais simplement parce qu’on ne trouve rien ni personne pour le remplacer. Un de ses préfets, monsieur J. d’Auriac, le dit très bien dans son livre La France d’aujourd’hui : "Si notre gouvernement se maintient debout depuis 40 ans, c’est plutôt par la faiblesse de ses adversaires que par sa propre vertu."

Cette opinion commence à devenir générale. Il serait donc utile de renoncer à accroître le nombre des ennemis du régime par ce mélange de faiblesse, de despotisme, d’intolérance et d’esprit de persécution qui finissent par devenir insupportables à tous sans rallier personne.

Pour réaliser ces sages conseils (sûrement plus sages que réalisables), la grande difficulté sera de s’affranchir de la terreur des fantômes. Il est à craindre que nous ne la subissions longtemps encore. Ce ne sera sans doute qu’avec le dernier homme que périra le dernier fantôme.


* * *