Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/412

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— À votre gré.

Le chemineur-de-mer disparut. Jean Carré, resté seul sous les hautes palmes qu’agitait une brise douce, ne tarda pas à s’endormir.

Ne troublons pas son sommeil !…

Pendant ce temps, l’escadre du roi d’Angleterre voguait à pleines voiles vers les côtes de Basse-Bretagne.

À mesure qu’on en approchait, l’amiral se sentait ennuyé grandement. Que dire à la princesse ? Comment lui révéler la chose fatale ? Il y a, même pour les amiraux, des passes difficiles. Celui-ci n’était pas fâché de la disparition de Jean, mais il déplorait d’avoir à l’annoncer. Quant au juif, il affectait un air navré. Au fond de son cœur, il jubilait.

Lorsqu’on eut abordé, la flotte hissa le drapeau noir. La princesse qui se promenait dans ses domaines, avec son enfant sur les bras, aperçut au loin cette forêt de mâts et de vergues, ainsi que les flammes de deuil qui flottaient à leurs drisses.

Elle tomba à genoux, l’âme frappée d’un pressentiment. À ce moment, l’amiral s’avançait vers elle, chapeau bas.

— Princesse, commença-t-il…

— Inutile de poursuivre, Jean Carré est mort, n’est-ce pas ?

— Comme vous dites, princesse !

— Retournez donc au pays d’où vous venez.