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ABRÉGÉ

mort d’Ibrahim. Mahomet, quoique pénétré d’une douleur profonde, voulut détruire cette erreur. « Citoyens, leur dit-il, le soleil et la lune sont des monumens de Dieu, et l’ouvrage de ses mains ; mais ils ne s’éclipsent ni pour la mort ni pour la naissance des mortels. »

Non content d’avoir établi deux lieutenans dans l’Arabie Heureuse, il envoya Ali prêcher les peuples de cette riche province, et lui recommanda la justice et la modération[1]. « Apôtre de Dieu, lui représenta Ali, je suis jeune, et vous m’envoyez commander à des tribus parmi lesquelles se trouvent des personnages respectables par leur âge et leur savoir. Comment oserais-je prononcer des jugemens en leur présence ? » Mahomet lui mettant la main sur la bouche, puis sur le cœur, fit cette invocation : « O Dieu ! délie sa langue, et éclaire son esprit. » Il ajouta ces paroles mémorables : « O Ali ! en quelque circonstance que tu te trouves, lorsque deux parties se présenteront devant toi, ne prononce jamais en faveur de l’une, sans avoir entendu l’autre. » Muni de ces instructions, Ali partit. Arrivé dans l’Arabie Heureuse, il lut aux peuples les lettres de son apôtre, et les pressa d’embrasser l’islamisme. Il prêchait à la tête d’une armée, et combattait ceux qu’il ne pouvait convaincre. Cette manière de persuader lui réussit. Toute la tribu de Hamdan se convertit en un jour. Il dépêcha un courrier pour porter cette nouvelle à Médine. La gloire de son nom, que tant d’exploits guerriers avaient rendu fameux, devançait ses pas. Dans tous les lieux où il passait, les Arabes, ou redoutant la force de son bras, ou persuadés par son éloquence, se soumettaient à l’islamisme. Le torrent se répandait de tous côtés, et l’épée levait les obstacles qu’il rencontrait dans son cours. La seule tribu de Najran conserva son culte. Fidèle à l’Évangile, elle aima mieux devenir tributaire que


  1. Abul-Feda, p. 129. Jannab.