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DE LA VIE DE MAHOMET.

au vainqueur, et il y commanda en maître. De retour à Médine, il s’occupa à lier ensemble les membres épars de sa monarchie naissante, et à lui donner de la consistance. Profond dans la connaissance du cœur humain, les gouverneurs, les généraux qu’il choisit furent presque tous de grands hommes. Abubecr, Omar, Othman et Ali, ses amis les plus distingués, lui succédèrent à l’empire, et en reculèrent fort loin les limites. Ses regards ambitieux se tournaent avec complaisance du côté de la Syrie. Déjà Khaled, traversant les sables brûlans de l’Arabie, était allé venger la mort de l’ambassadeur, que la lâcheté des Grecs avait immolé au sein de la paix ; déjà ce vaillant capitaine avait remporté sur eux une des plus étonnantes victoires dont les annales de la postérité fassent mention. Le sang de plusieurs milliers de Grecs suffisait à la vengeance, et non pas à l’ambition. Mahomet avait dessein de démembrer l’empire d’Héraclius ; mais, aussi sage dans ses mesures que prompt dans l’exécution, il sentit qu’avant de l’attaquer il fallait s’assurer des petits princes qui régnaient sur l’Arabie Pétrée. Le même général qui, huit ans auparavant, n’avait pu rassembler sous ses drapeaux que trois cents treize soldats, marcha vers la Syrie à la tête de trente mille hommes. Après avoir traversé comme un éclair des déserts et des sables dévorans, il établit son camp à Tabuc. Vingt jours lui suffirent pour soumettre tous les peuples jusqu’aux frontières de la Syrie. Ayant imposé tribut à ceux qui ne voulurent pas abandonner leur religion, il retourna à Médine chargé de dépouilles et couvert de gloire. A son retour il apprit la soumission des rois d’Hemiar qui gouvernaient différentes provinces de l’Yemen. Les petits princes idolâtres vinrent tour à tour s’humilier devant le conquérant de la Mecque, et embrassèrent sa religion. Toute cette grande péninsule qui s’étend entre la mer Rouge et le golfe persique obéit à ses lois. Il se préparait à pénétrer dans l’empire des Grecs ; plus de quarante mille guerriers rassemblés sous ses étendards allaient ébranler le trône des Césars, lorsque la