Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/309

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Puis un sociologue, dont l’information savait se faire vivante et pittoresque, se révélait dans Pêcheurs Bretons : les connaisseurs faisaient un succès des plus vifs à cette enquête magistrale et l’Académie sanctionnait leur suffrage en lui attribuant, en 1921, le prix Marcellin Guérin, comme elle avait attribué, en 1906, à Partances, la majeure partie du prix Archon-Despérouses.

Quel sera maintenant le sort de L’Affligé ? C’est un très beau livre, un peu abrupt peut-être, non par sa forme, qui est parfaite, mais par sa donnée et ses personnages, qui ont encore, sous leur vernis de civilisés, toute la sauvagerie des premiers âges. À ceux qui ne se plaisent que dans une Bretagne conventionnelle, je dirai : « Laissez-là L’Affligé. Ce livre n’est pas pour vous. » Aux autres, que n’effraient pas les constatations d’une psychologie aigüe quelquefois jusqu’à la cruauté, je dirai au contraire : « Voilà le livre qu’il faut lire ; voilà, non pas toutes les âmes certes (et l’auteur n’a garde de généraliser), mais quelques spécimens des âmes qui hantent les fourrés ténébreux, les vieilles salles embrumées de nos manoirs bretons, — et même de certains logis moins aristocratiques, car, dans toutes les classes de la société, on rencontre de ces Celtes extrêmes à la façon de François de Trohanet, capables du meilleur comme du pire, et qui sont du bois dont on fait les forbans, les héros et les saints. »

Eh ! oui, encore un coup, cela nous change de l’églogue habituelle, et Kérizel et Prat-Meur n’ont que de lointaines analogies avec la tour d’Elven. De l’églogue, il y en a sans doute, même dans ce livre amer, et l’on ne s’y assassine pas à toutes les pages : vous feuillèteriez longtemps les maîtres du genre avant de trouver, dans des paysages plus