Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/231

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pelait crûment en Bretagne son « apostasie ». C’était même quelque chose de pis ou de mieux, comme on voudra : car, devançant l’arrêt du tribunal suprême, Quellien, interprète du sentiment public qui avait alors le nom de Renan en exécration — et restait si indulgent à Lamennais — imaginait déjà le genre de châtiment posthume qui attendait le célèbre « renégat »[1]

Cette Messe Blanche fut en quelque sorte son Vase Brisé. On prit l’habitude de l’accoler au nom de l’auteur, comme si elle avait été son unique réussite et que, dans Annaïk et dans Breiz, il n’y eût pas dix petits chefs-d’œuvre d’égale valeur. Faisons bon marché, si vous voulez, et je n’ai pas été le dernier à le faire, de l’historien (?) d’Une compagne de Jeanne d’Arc et de la Bretagne armoricaine (malgré certaine « dédicace » à ses deux fils, Georges et Allain, qui est une merveilleuse cantilène en prose, et en prose française de surcroît). En général, sauf peut-être dans ses Contes du pays de Tréguier, où il est soutenu et comme porté par son sujet, Quellien n’est pas à l’aise dans la langue de Voltaire, qui fut pourtant aussi celle de Chateaubriand. Oh ! non pas qu’il écrive mal ! Sa phrase au contraire est jolie, quoique un peu obscure et recherchée ; elle est souvent fine de pensée et de trait, et elle garde cependant je ne sais quoi de gauche, d’étriqué, de souffreteux. On sent que le français lui était un costume d’emprunt, qu’il ne respirait bien, n’était vraiment lui-même que sous la « chuppen » flottante des Trégorrois.

Aussi bien n’est-ce pas à l’écrivain de langue fran-

  1. V. une analyse et des extraits de cette gwerz fameuse dans la 1re  Série de l’Âme bretonne (art. cit.).