Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/374

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bien fléchi en Bretagne. Nous avons trop vécu avec les morts ; la Bretagne se « modernise », on le sait assez. Mais trop de liens la rattachaient encore au passé : elle a hâte de les trancher et d’abdiquer définitivement sa fonction historique de gardienne des tombeaux.

Plestin, Plouaret, Lesneven, Plouha, Pleyben, vingt autres de nos gros bourgs bretons ont désaffecté leurs anciens cimetières. Plougastel a fait du sien un foirail, une grande place rase au milieu de laquelle son magnifique calvaire prend des airs de guignol. Et Perros, à son tour, parle de supprimer le cimetière qui borde sa vieille église romane et dont le portique d’entrée, encastré à demi dans un pignon voisin, n’était déjà plus qu’une ruine.

Quand ce n’est pas au nom de l’hygiène, c’est au nom de la viabilité qu’on prononce ces désaffectations sacrilèges. Aucune voix ne s’élèvera donc dans le pays pour traduire l’obscure protestation des consciences et défendre nos tombeaux ? Peut-être n’est-il pas trop tard encore. L’œuvre de profanation n’est pas consommée partout. À Perros même, peut-être suffirait-il de faire appel aux bons sentiments du maire et des édiles, braves gens au fond, qui ont pu s’abuser, mais que je crois incapables de commettre une vilenie pour rien, pour le plaisir. L’enclos actuel est-il trop étroit pour les besoins d’une population qui a presque doublé en dix ans ? Qu’on rouvre alors l’ancien cimetière trévial de La Clarté. Mais qu’on ne touche pas aux morts du cimetière paroissial.

Ainsi parlerait votre Ligue, Barrès, si sa tutelle ne se restreignait pas expressément aux églises de France. Et cependant, pour qu’elle nous prêtât son concours, pour qu’elle s’émût avec son chef à la