Page:Le Goffic - Le Crucifié de Keraliès.djvu/24

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ses dévotions faites, la procession rentrée, il ne quittait plus l’auberge et revenait seul à l’île.

Pourtant on finit par lui découvrir une préférence. Il y avait, à Pleumeur, une auberge entre toutes misérable et triste. La maison, basse, en pisé, coiffée de chaume pourri, s’affaissait sur le chemin, branlait comme une infirme entre ses quatre murs. Un gui servait d’enseigne. Le logis était noir, mal éclairé, de jour, par une petite fenêtre à barreaux, et plus mal encore, de nuit, par le bout de résine qui crépitait au foyer, fiché dans une branche fendue. L’hôtesse était une sexagénaire aux yeux morts, toute pliée sur elle-même, qui marmonnait d’interminables pater sur un banc du foyer et que suppléait dans le service une petite nièce à elle, orpheline, Coupaïa Kergoat.

D’un sang pauvre, sans grâce, sans jeunesse, seule depuis la mort de sa mère avec cette vieille femme taciturne, Coupaïa avait grandi dans les prières et les macérations, communiant tous les dimanches, jeûnant tout le carême, exagérant à plaisir les pratiques d’une dévotion superstitieuse. Que quelqu’un voulût jamais d’elle pour femme, elle n’y songeait point. Elle se