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le château

Sa mère revint avec une potion. Le médecin recommandait à Suzanne de rester au lit ce soir. Si, le lendemain, elle se sentait mieux, elle pourrait se lever le midi. Sinon, il viendrait la voir.

— Belle arrivée pour toi, Marielle ! Tu vas vouloir t’en retourner.

— Ah ! non, par exemple, si je ne gêne pas. Je resterai avec toi tant que tu voudras. Le reste du temps, je courrai les bois.

— Allons, viens Marielle, que je t’installe. Après, nous descendrons, le dîner va sonner. Et toi, Suzanne, que veux-tu manger ?

— Ah ! sur un plateau, rien n’est bon ! N’importe quoi, maman…

Marielle prit possession d’une chambre ravissante. Elle achevait de suspendre ses robes, de se rafraîchir un peu lorsque le gong sonna le repas du soir.

Elle alla redire un mot à Suzanne et insista pour la consoler :

— Je t’assure, Suzanne, qu’être malade dans une aussi belle maison, ce n’est pas aussi triste…

Mais non, Marielle ne le croyait pas. Marielle à son tour avait un peu peur. Marielle ne pouvait plus envier Suzanne.

Elle ne pouvait plus envier personne. Pourtant, cette salle à manger magnifique, avec ses baies qui enchâssaient tout le couchant, avec le feu que l’on avait fait dans la cheminée pour réchauffer le soir, avec sa grande table sculptée si bien servie, tout continuait à être beau comme dans un conte. Mais la mère, le père, les frères de Suzanne, qui étaient polis et voulaient quand même être gais,