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monseigneur était un peu vieux

attachait, prenait sa part des responsabilités. Il était si bon, si intelligent, si fin pour tout deviner. C’était un solide appui, ce grand abbé aux yeux si bleus, qui vieillissait mince et droit, et qui paraissait démesurément grand ; sa nièce, devant lui, pouvait au moins redevenir enfant, se sentir protégée. Entre ses voyages de colonisateur, il habitait maintenant avec eux, et elle lui remettait les problèmes les plus épineux.

La vie commençait d’ailleurs pour eux tous à être moins compliquée. Les petits grandissaient et secondaient maintenant Anne-Marie. Ceux qui ne marchaient pas encore à la mort de la mère, étaient maintenant adorables de gestes et d’intelligence et ils égayaient la maison de leur joie de vivre.

Et à présent qu’elle avait moins de fardeaux et plus de consolations, il allait falloir, pour Anne-Marie, s’arracher à toutes ces tendresses, puisqu’elle avait la vocation.

— Quand Dieu désire une chose, lui avait dit Monseigneur, Il fait en sorte qu’elle soit possible. Anne-Marie, le cœur gros, demanda son entrée chez les Sœurs de l’Immaculée-Conception. On l’accepta. La date du départ fut fixée.

Personne, dans la maison, n’eut le courage de se réjouir de la volonté de Dieu. On s’y résignait. On ne s’y opposait pas, mais à mesure qu’approchait le jour fatal, les figures s’attristaient. En cachette, la plus triste, c’était encore la figure d’Anne-Marie. Dieu savait qu’elle avait toujours tout supporté par amour pour Lui ! et qu’elle s’était depuis sa petite enfance, entraînée au