Page:Le Parnasse contemporain, I.djvu/85

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.




LAZARE




A la voix de Jésus Lazare s’éveilla.
Livide, il se dressa debout dans les ténèbres ;
Il sortit tressaillant dans ses langes funèbres,
Puis, tout droit devant lui, grave et seul s’en alla.

Seul et grave, il marcha depuis lors dans la ville,
Comme cherchant quelqu’un qu’il ne retrouvait pas ;
Et se heurtant partout, à chacun de ses pas,
Aux choses de la vie, à la plèbe servile.

Sous son front reluisant de la pâleur des morts,
Ses yeux ne dardaient pas d’éclairs ; et ses prunelles,
Comme au ressouvenir des splendeurs éternelles,
Semblaient ne pas pouvoir regarder au dehors.

Il allait, chancelant comme un enfant, lugubre
Comme un fou. Devant lui la foule s’entr’ouvrait.
Nul n’osant lui parler, au hasard il errait,
Tel qu’un homme étouffant dans un air insalubre.