Page:Le Parnasse contemporain, II.djvu/167

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III


Sous les cieux que peuplait de ses grâces robustes
L’héroïque troupeau des filles d’Astarté,
Calme, j’aurais été, durant l’éternité,
Le familier discret de tes formes augustes.

À l’ombre des splendeurs sereines de ton corps.
J’aurais dormi le rêve éternel que je pleure,
Absous des trahisons de l’espace et de l’heure
Qui font tous nos pensers douloureux & discords.

Et d’une mort sans fin, plus douce que la vie,
Ta lèvre eût mesuré, seule, l’enivrement
À mes sens confondus dans l’immense tourment
Dont Vénus embrasait l’immensité ravie…

O douleur ! — le temps fuit, — le temps brise, — tu pars !
Et, des bûchers mortels dédaignant la brûlure,
Tu t’enfuis, emportant parmi ta chevelure,
De mes cieux déchirés tous les astres épars !


IV


Et pourtant l’Infini, qu’en leur vol diaphane
Poursuivent, sous ton front, tes rêves surhumains,
Je l’enfermai pour toi, — moi mortel, moi profane, —
Dans mon cœur élargi par mes sanglantes mains.