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EMMANUEL DES ESSARTS

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LES AMANTS DE LA LIBERTÉ

I


Il est de par le monde une vierge proscrite,
Etre toujours maudit & toujours redouté,
Fuyant sous les clameurs d’une foule hypocrite
Qui peut tout lui ravir, hors l’immortalité.

Elle est belle, & pourtant son radieux visage
S’assombrit, traversé par des plis soucieux :
On dirait un superbe & morne paysage
Où l’ombre se répand sur l’or changeant des cieux.

Elle a pris ses pâleurs à la Mélancolie,
Et sa joue a blêmi comme sous un affront ;
Sur ses épaules flotte une pourpre avilie ;
La couronne d’épine est saignante à son front.