Page:Le Parnasse contemporain, III.djvu/166

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O bon Samaritain des Nations ! Toi seule,
Arrachant sa proie au vainqueur,
Pauvres soldats blessés qu’allait broyer la meule,
Tu les emportas sur ton cœur.

Tu leur fis de tes bras la prison la plus douce,
Et, les réchauffant dans ton sein,
Tu donnas aux vaincus, à ceux que tout repousse,
Place au foyer et part au pain.

Val Travers ! Val Travers ! Port de salut, refuge,
Où cet exode s’assura,
Abri dans la tourmente, arche dans le déluge,
Oasis du sombre Jura,

C’est toi qui recueillis, qui sauvas cette armée,
(Notre dernière armée, hélas !)
Troupe errante, éperdue, épuisée, affamée,
S’entrechoquant sur le verglas,

Traînant ses pieds sanglants dans la neige durcie,…
Car l’hiver cruel jusqu’au bout
Fit de cette campagne en France une Russie ;
Et tout fut notre ennemi, tout !

Alors pour bien montrer que cette guerre infâme,
Du passé trop sanglant retour,
N’avait pas étouffé dans tout peuple et toute âme
Le rayon divin de l’Amour ;