Page:Le Parnasse contemporain, III.djvu/441

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



EN BRESSE


Il soufflait cette nuit un grand vent de jeunesse.
Ah ! bonsoir aux soucis maintenant ! Notre Bresse
A mis à son corsage une fleur de pêcher.
La vieille fée en Saône a jeté sa béquille,
Et rit à pleine voix comme une jeune fille.
Hourrah ! l’amour au bois, l’amour va se cacher !

Et me voilà parti. Gai comme l’alouette,
Je m’en vais, fredonnant quelque vieille ariette.
Devant moi tout est calme, immobile et charmant.
C’est mai. Le ciel joyeux rit au travers des branches,
Sous les buissons en fleur l’eau court, et, toutes blanches,
Les fermes au soleil se réchauffent gaiement.

Voici la mare verte où vont boire les canes,
L’enclos ensoleillé, plein de vaches bressannes,
D’où l’on voit devant soi les merles s’envoler ;
Ici les peupliers ébranchés ; là, des saules
Trapus, noueux, courbant leurs solides épaules
Comme de vieux lurons que l’âge fait trembler.

Plus loin c’est la maison des Frères, et l’église
Avec son coq gaulois et sa toiture grise ;
Puis, l’auberge enfumée : Au grand saint Nicolas.