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un état momentané de souffrance, ces peuples ont toujours eu recours au même procédé : ils ont restauré les mœurs et les institutions qui, ayant assuré leur bien-être dans le passé continuaient à fleurir chez les nations modèles de leur époque[1].

  1. Les extraits suivants prouvent que les anciens comme les modernes se sont accordés pour ériger en préceptes cette judicieuse pratique.
    Xénophon résume ainsi, dans un dialogue entre Socrate et Périclès, les causes de la décadence d’Athènes et les moyens de réforme. « Alors Périclès : ― Je m’étonne, Socrate, que notre ville ait ainsi décliné. Pour moi, je pense, reprit Socrate, que de même qu’on voit certains athlètes, qui t’emportent de beaucoup sur d’autres par la supériorité de leurs forces, s’abandonner à la nonchalance et descendre au-dessous de leurs adversaires, de même les Athéniens, se sentant supérieurs aux autres peuples, se sont négligés et ont dégénéré. ― Et maintenant, que pourraient-ils faire pour recouvrer leur ancienne vertu ? Alors Socrate : Il n’y a point ici de mystère ; il faut qu’ils reprennent les mœurs de leurs ancêtres, qu’ils n’y soient pas moins attachés qu’eux, et alors ils ne seront pas moins vaillants ; sinon, qu’ils imitent du moins les peuples qui commandent aujourd’hui, qu’ils adoptent leurs institutions, qu’ils s’y attachent de n même, et ils cesseront de leur être inférieurs ; qu’ils aient plus d’émulation, ils les auront bientôt surpassés. » (Mémoires sur Socrate, liv. V., chap. v.)
    « Il y a beaucoup à gagner, en fait de mœurs, à garder les coutumes anciennes. Comme les peuples corrompus font rarement de grandes choses, qu’ils n’ont guère établi de sociétés, fondé de villes, donné de lois, et qu’au contraire ceux qui avaient des mœurs simples et austères ont fait la plupart des établissements, rappeler les hommes aux maximes anciennes, c’est ordinairement les ramener à la vertu. » (Montesquieu, de l’Esprit des lois, liv. V, chap. vii.)
    « On doit remarquer que ce qui a le plus contribué à rendre les Romains les maîtres du monde, c’est qu’ayant combattu successivement contre tous les peuples, ils ont toujours re-