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guérison d’un enfant ou d’un cheval ; pas de sorcier ou de somnambule qui ne les trouve crédules s’il promet au conscrit un bon numéro. Chaque village a son docteur qui guérit les entorses par insufflation et qui révèle de quel saint tel enfant est entiché. Le moindre hameau possède une commère qui fait les pèlerinages, dit les neuvaines et tire les points, c’est-à-dire jette dans l’eau les quelques grains de blé qui, par leur mode de submersion, doivent faire connaître la gravité de la maladie. Il est d’ailleurs bien difficile de combattre avantageusement ces superstitions car les enfants quittent l’école avant l’âge où leur jugement développé pourrait en comprendre l’absurdité.

C’est ce qui est arrivé pour les enfants des époux J*** N***. L’aîné a été mis au travail aussitôt après sa première communion il avait douze ans. Son frère, malgré sa chétive constitution, a quitté l’école pour le même motif avant sa onzième année. Leur instruction, on le comprend, est donc à peine suffisante pour les besoins ordinaires de la vie, et leur éducation laisse d’autant plus à désirer que les parents étaient les premiers à trouver trop exigeants l’instituteur et le curé. Ces enfants ne manquent pas d’intelligence ils ont un caractère doux et facile ; mais l’excessive économie de leur père leur a donné des idées d’intérêt et un air grave