total élevé, Julien remarqua qu’il s’en montrait presque jaloux et prenait de l’humeur.
Pour lui, il arriva séduit, admirant et presque timide à force d’émotion, dans le premier des salons où l’on dansait. On se pressait à la porte du second et la foule était si grande qu’il lui fut impossible d’avancer. La décoration de ce second salon représentait l’Alhambra de Grenade.
— C’est la reine du bal, il faut en convenir, disait un jeune homme à moustaches, dont l’épaule entrait dans la poitrine de Julien.
— Mademoiselle Fourmont, qui tout l’hiver a été la plus jolie, lui répondait son voisin, s’aperçoit qu’elle descend à la seconde place, vois son air singulier.
— Vraiment elle met toutes voiles dehors pour plaire. Vois, vois ce sourire gracieux au moment où elle figure seule dans cette contredanse. C’est d’honneur impayable.
— Mademoiselle de La Mole a l’air d’être maîtresse du plaisir que lui fait son triomphe, dont elle s’aperçoit fort bien. On dirait qu’elle craint de plaire à qui lui parle.
— Très bien ! voilà l’art de séduire.
Julien faisait de vains efforts pour apercevoir cette femme séduisante : sept ou huit hommes plus grands que lui l’empêchaient de la voir.
— Il y a bien de la coquetterie dans cette retenue si noble, reprit le jeune homme à moustaches.
— Et ces grands yeux bleus qui s’abaissent si lentement au moment où l’on dirait qu’ils sont sur le point de se trahir, reprit le voisin. Ma foi, rien de plus habile.
— Vois comme auprès d’elle la belle Fourmont a l’air commun, dit un troisième.
— Cet air de retenue veut dire : Que d’amabilité je déploierais pour vous, si vous étiez l’homme digne de moi !
— Et qui peut être digne de la sublime Mathilde ? dit le premier : quelque prince souverain, beau, spirituel, bien fait, un héros à la guerre, et âgé de vingt ans tout au plus.
— Le fils naturel de l’empereur de Russie… auquel, en fa-