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LES SALMIGONDIS.

ces malheureux bannis s’éloigner à pas lents de leurs foyers ravagés, regarder en arrière pour contempler encore une fois les flammes dévorant leurs maisons, ou la poussière élevée au-dessus de leurs décombres. Alors se dirigeant vers l’asile le plus proche, ils se préparaient à commencer une carrière de dépendance et de pénurie, en attendant qu’un changement de fortune les mît à la place de leurs oppresseurs. En ce pays, où chaque ville formait un État séparé, passer de l’un à l’autre, c’était quitter un lieu chéri pour vivre sur un sol étranger ou plutôt ennemi ; car chacun de ces petits états nourrissait contre ses voisins des sentimens de mépris ou de jalousie. L’exilé, forcé de se réfugier près de ceux qu’il avait combattus et qui devaient voir son humiliation avec joie, éprouvait sans doute un redoublement de douleur ; mais il préférait en général cette triste existence aux ressources que lui offrait le service étranger, qui l’aurait entraîné loin de cette terre d’Italie, si chère à ses enfans, loin des murailles natales pour lesquelles les Italiens de ce temps conservaient un amour, une vénération que les plus criantes injustices, les plus odieuses persécutions ne pouvaient affaiblir.