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n’ait planté et établi par loix es régions que bon lui a semblé[1]. J’estime, continue-t’il, qu’il ne tombe en l’imagination humaine aucune fantaisie si forcenée qui ne rencontre l’exemple de quelque usage public et par conséquent que notre raison n’étaïe et ne fonde sur quelque aparence de raison ou sur des pretendus miracles, car les miracles, dit-il, sont selon l’ignorance en quoi nous sommes, des choses de la nature et non pas selon l’être de la nature même. En effet, il n’y a point eu d’opinion si fausse et si erronée qu’elle puisse être, qui n’ait trouvé des fauteurs, ni de pratique si extravagante qui n’ait été autorisée[2] : celle des augures est de cette condition ; et la raison de cela est que la vérité et le mensonge ont leur visage conforme, le port, le goût et les allures pareilles, nous les regardons de même oeil[3]… d’où vient que la plûpart des hommes aiment à mentir et qu’ils ne se contentent pas de débiter des mensonges, mais sont bien aises aussi d’en entendre et triomphent quand on les entretient de choses qui ne sont que sornettes, ou qu’ils en content eux-mêmes. C’est qu’ils y trouvent leur profit.

« Plusieurs et même de très grands personnages ne se plaisent pas seulement à tromper les autres, mais à se tromper aussi eux-mêmes ; ce qui me donne de l’étonnement mêlé de quelque indignation, dit Lucien ; car pour ne rien dire des Poëtes qui ne disent presque que des fables, n’avons nous pas, dit-il, des Historiens comme Ctesias, Herodote et

  1. Ess. de Montagne. Liv. I, Ch. 31, pag. 79.
  2. Recueil des Confer : Tom. 5, pag. 375.
  3. Ess. de Montagne 1036.