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hommes, ou ils s’obligeoient par voeu de le faire, et tels sacrifices se faisoient par les mains des Druydes, qui étoient leurs Prêtres en ce tems-là, et se persuadoient que les Dieux pouvoient être apaisés par la vie d’un homme, pour sauver celle d’un autre, quelquesfois ils les faisoient brûler tout vifs, quelquesfois ils les faisoient mourir à coups de flèches. C’est pourquoi, quand quelqu’un étoit en extrémité de maladie, ils apelloient et faisoient venir vers eux quelqu’un de ces Druydes afin de sacrifier à Drye, Dieu des Enfers et ennemi de la vie, quelqu’un de ceux qui avoient mérité la mort, ou à faute de ceux-ci quelque pauvre misérable, croïant que ce Dieu, avide de sang humain, seroit rassassié par la mort d’un tel homme, et que la vie du malade seroit prolongée. Sur quoi Plutarque[1] dit fort bien, qu’il eut mieux valu que les hommes n’eussent jamais eu la connoissance des Dieux, que de croire, comme ils faisoient, qu’il y en eut qui se repussent et qui fussent avides du sang humain.

En effet, c’étoit une étrange fantaisie, comme dit Montagne[2], c’étoit une étrange fantaisie à des hommes, de vouloir païer la bonté divine de notre affliction, comme faisoient, dit-il, les Carthaginois qui immoloient leurs propres enfans à Saturne ; et qui n’en avoit point, en achetoit et le faisoit brûler tout vif, étant cependant le Père et la Mère tenus d’assister à ce cruel office avec une contenance gaïe et contente. Et comme les Lacédémoniens, dit-il, qui mignardoient

  1. Théatre du monde, Tom. 1, pag. 121.
  2. Essai de Montagne, pag. 489.