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DANTON

ROBESPIERRE, méprisant.

Le nom de l’amour est banal, sa réalité est rare.

DANTON, méchamment.

Il y a de certains hommes, dit-on, qui ne la connaissent point.

ROBESPIERRE, après un court moment de silence, froidement, les mains un peu nerveuses.

Je ne suis pas venu parler des débauches de Danton. — Camille, tu t’obstines, malgré mes avertissements, à suivre la voie où de mauvais conseils et ton étourderie t’ont jeté. Ton pamphlet malfaisant va semer les divisions par toute la France. Tu dépenses ton esprit à ébranler le crédit des hommes nécessaires à la République. Toutes les réactions s’arment de tes sarcasmes contre la liberté. Longtemps j’ai désarmé les haines que tu soulèves, je t’ai sauvé deux fois : je ne te sauverai pas toujours. L’État s’émeut des complots des factieux ; je n’ai aucune volonté contre celle de l’État.

CAMILLE, blessé et blessant.

Épargne-toi la peine de tant songer à moi. Ta sollicitude me touche, Maximilien, mais je n’ai besoin de personne : je sais me défendre seul, et je marche sans lisières.

ROBESPIERRE.

Vaniteux, ne réplique point : ton étourderie est ta seule excuse.

CAMILLE.

Je ne veux point d’excuse. J’ai bien mérité de la patrie. Je défends la République contre les Républicains. J’ai parlé librement, j’ai dit la vérité. Quand toute vérité n’est plus bonne à dire, c’est qu’il n’y a plus de République. La devise des Républiques, ce sont les vents qui soufflent sur les flots de la mer : Tollunt, sed attollunt ! Ils les agitent, mais ils les élèvent !

ROBESPIERRE.

La République n’est pas, Desmoulins. Nous la faisons. Ce n’est pas avec la liberté qu’on fonde la liberté. Comme