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THÉÂTRE DE LA RÉVOLUTION

nous ne serons plus, d’autres armées sortiront de nos os, pour mourir et pour tuer, jusqu’à ce que la liberté ait broyé les tyrans.

CHAPELAS.

Cela te fait sourire, d’Oyron. Trouves-tu cela si plaisant ?

D’OYRON, méprisant.

Je veux bien être tué, je ne veux pas être ridicule.

TEULIER.

La patrie est en danger, et il se mire dans sa glace !

QUESNEL, conciliant.

Allons, citoyens, ne nous disputons plus. Est-ce que de bons bougres de sans-culottes ne doivent pas toujours faire céder leurs sympathies ou leurs antipathies naturelles à l’intérêt de la nation ?

TEULIER.

Citoyen représentant, tu dirais vrai si je n’avais vu par expérience qu’on ne fait rien de bon et de grand qu’entre gens qui s’estiment et croient aux mêmes choses. Ce n’est pas le cas pour nous : sépare donc nos tâches. Pour accomplir des actions héroïques, il faut y apporter un cœur tout croyant et brûlant. Nos pères disaient qu’avec la foi on marche sur les eaux. Ils parlaient ainsi de la fausse foi romaine. La foi républicaine est plus puissante encore. Elle passe au travers du feu et de la mort, et elle recrée le monde à chacun de ses pas. Mais pour qu’elle ait sa vertu tout entière, il faut éloigner de nous ceux qui ne sont pas capables d’en sentir la brûlante haleine sur leur front. D’Oyron est trop aristocrate, et d’un monde trop blasé, pour comprendre nos transports. Qu’il ne vienne pas au moins les troubler par son doute ; qu’il ne puisse pas énerver la force de nos soldats ! Il est d’autres besognes où tu peux l’occuper.

QUESNEL.

Je ne demande pas mieux que d’employer chacun aux tâches qui lui conviennent. Citoyen d’Oyron, puisque tu