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THÉÂTRE DE LA RÉVOLUTION

TEULIER.

La lettre d’abord… Quesnel veut se lever. Ne bouge pas. Je vais la prendre.

QUESNEL.

Sur la table, sous le globe de verre. Teulier sort. — Seul, un instant. Ainsi… Ainsi..? — Impossible ! Cela n’est pas. Il ne faut pas que cela soit… — Teulier revient avec la lettre. Regarde, Teulier ; cette lettre est précisément d’accord avec ce que tu nous as dit toi-même, dans le conseil : ton expédition manquée par la faute de d’Oyron, sa feinte d’attaque sur le Bretzenheim, la fuite de sa colonne…

TEULIER.

Calomnies pour le perdre !

QUESNEL.

Tu l’accusais, ce matin. Tu as été jusqu’à dire que s’il s’était entendu avec les Prussiens, il n’eût pas agi autrement.

TEULIER.

Eh ! tu sais bien comme je suis violent. Quand la passion m’emporte, je fonds tête baissée, je ne pense qu’à broyer l’adversaire. J’en voulais à d’Oyron ; il n’a pas l’enthousiasme sacré et le souffle qu’il faut pour enlever nos bataillons ; il me désobéit, il me pousse à bout par son insolence d’aristocrate. Mais rien dans ce qu’il fit hier ne peut être suspecté. Il prit le Bretzenheim et passa la garnison au fil de l’épée. Il n’opéra pas, c’est vrai, sa jonction avec moi. Mais mon plan était imprudent, et peut-être sa diversion a-t-elle sauvé l’armée. Au point de vue de la stricte discipline, il est coupable de n’avoir pas obéi ; mais qui oserait l’accuser sérieusement d’avoir su changer à propos des dispositions erronées ? Ma surprise a échoué : la faute en est à moi. Il n’y a qu’un ennemi, et un ennemi très au courant de nos dissensions, pour tâcher de le perdre, sous un semblable prétexte, qui satisfait nos rancunes.